Atos: le fonds TCI complique le projet d’Airbus (LE FIGARO)

 

Détenteur de 3 % du capital, l’activiste Chris Hohn dénonce une opération nuisible aux intérêts des actionnaires.

Un nouveau feuilleton à rebondissements en perspective? Moins d’une semaine après l’annonce d’une «nouvelle phase de discussions» entre Airbus et Atos pour que l’avionneur achète 29,9 % du capital d’Evidian, la future société qui naîtra de la scission d’Atos à l’été prochain, Chris Hohn, le bouillonnant patron du fonds d’investissement britannique TCI, veut y couper court.

Loin de partager la vision des deux sociétés d’un accord «stratégique et technologique de long terme», Chris Hohn, qui détient 3 % du capital d’Airbus, voit dans cette possible prise de participation «un sauvetage (…) d’une entreprise accablée par des niveaux insoutenables de dettes et d’autres engagements». Dans une lettre envoyée lundi, il demande au président exécutif d’Airbus, Guillaume Faury, de renoncer à une opération qu’il estime plus politique que financièrement stratégique. Il appuie son argumentation sur une citation du communiqué d’Atos daté du 16 février, évoquant, entre autres, à propos de cet accord, l’opportunité d’«assurer une souveraineté technologique en France et en Europe».

Pour Chris Hohn, «cela suggère qu’il existe une certaine motivation politique pour qu’Airbus réalise cette transaction. La direction et le conseil d’administration ont le devoir d’agir dans le meilleur intérêt d’Airbus et de ses actionnaires». Habitué des coups de pression pour défendre ses intérêts, le fonds TCI se réserve le droit d’intenter une action en justice pour obtenir des dommages et intérêts si l’opération aboutit. Il a fait déposer une motion demandant des réponses sur 16 points pour l’assemblée générale des actionnaires d’Airbus prévue pour le 19 avril.

Le précédent Safran

Se refusant à commenter la lettre, Airbus défend les «nombreuses complémentarités et synergies avec l’activité d’Evidian», dans la cybersécurité et le big data. Airbus pourrait aussi, avec ce partenariat, se renforcer sur les technologies nécessaires au cloud du système de combat aérien du futur. Selon Chris Hohn, entretenir une «relation mutuellement productive et rentable avec Evidian» peut se faire sans prendre de participation dans la société. L’opération est encore loin d’être faite. Les deux groupes ont entamé le processus de revue des activités («due diligence»), mais, à l’issue de ce dernier, «Airbus (pourra) se retirer si la qualité des actifs n’est pas en ligne avec ses vues», rappelle un analyste. Atos a bien précisé que les négociations engagées n’étaient pas exclusives. Si le montant de l’offre n’a pas été communiqué, la valorisation proposée par Airbus serait sensiblement supérieure aux 4,2 milliards d’euros proposés par Onepoint à l’automne dernier

Selon Kepler Cheuvreux, elle avoisinerait les 6 milliards d’euros, avec un apport de liquidité d’environ 1 milliard d’euros. «Ce montant serait suffisant pour faire face aux coûts nécessaires de restructuration pour la branche d’activités historiques d’Atos», en cohérence avec le plan stratégique présenté en juin dernier. À condition, évidemment, que l’offre aboutisse. L’offensive de TCI a lourdement pesé sur l’action Atos mardi, qui a perdu près de 7 % à la Bourse de Paris. Les investisseurs ont en mémoire la façon dont Chris Hohn et le fonds TIC ont fait campagne contre le rapprochement de l’équipementier aéronautique Safran et du motoriste Zodiac, en 2017. Actionnaire à 4 % de Safran, le Britannique avait bataillé dur. L’opération avait fini par aboutir, mais avec un prix d’acquisition revu à la baisse de 15 %.

https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/atos-le-fonds-tci-complique-le-projet-d-airbus-20230221