Une nouvelle ardoise d’environ 25M€ vient de tomber pour Atos à un moment où le groupe s’en serait bien passé, comptant désormais chaque euro. C’est un procès hérité du rachat de SEMA GROUP par Atos en 2004.
Pour comprendre la toute récente perte de ce procès entre Atos et le fonds de pension de la British Rail, un court rappel s’impose. Cela ne va vous prendre qu’une minute de lecture, mais sans cela vous vous demandriez ce que vient faire la British Rail avec Atos.
En 2004 sous la houlette de Bernard Bourigeaud, et après avoir digéré le rachat de Origin, Atos a racheté à Schlumberger la partie infogérance du groupe SEMA en 2004 partie que Schlumbergé avec hérité en rachetant la totalité du group SEMA 3 ans auparavant et renommé Schlumberger-Sema. Puis en bon pétrolier qu’ils étaient, Schlumberger réalisa que l’informatique, c’était pas leur métier et revendirent à Bernard Bourigeaud la branche infogérance de SEMA.
C’était d’ailleurs un des regrets de Bernard Bourigeaud le fondateur d’Atos. Il m’avait dit quelques mois avant sa mort « mon erreur ça a été SEMA. On a bâclé la Due Diligence, car jamais on aurait imaginé qu’en 3 ans Schlumberger nous l’aurait laissé dans cet état. Il nous a fallu 2 ans juste pour la ramener à l’équilibre ». J’ai aussi fait cet aparté « Bourigeaud-Sema » parce que dans la partie 2 de « Thierry et la Chocolaterie« , on reviendra sur le concept de « Due Diligence bâclée ».
Dans le panier de la mariée SEMA, il y avait le contrat des JO que SEMA organisait depuis 1998. C’est grâce à cette acquisition qu’Atos est l’organisateur des JO de Paris.
Mais dans le panier de la mariée SEMA, il y avait aussi une filiale d’infogérance issue de la British Rail.
En effet, lors de la privatisation de la British Rail en 1997 par Margaret Thatcher (c’était pour voir si vous suiviez) SEMA a racheté la division infogérance de la compagnie d’état « British Rail ». Fort logiquement, cette division anglaise est ensuite devenue partie du groupe ATOS région UK.
Sans entrer dans les détails, en Angleterre la retraite est moitié par points, moitié par fonds de pensions et un litige opposait la caisse des retraites de la British Rail sur la partie à payer par Atos. Atos refusant de payer la partie des retraites avant la privatisation, elle avait assigné la British Rail ou vice versa, pour être franc, vu les sommes en jeu, je laisse à des membres faire des recherches pour plus de détails.
Après avoir perdu en première instance, Atos avait fait appel. Le résultat vient de tomber et Atos a perdu l’appel le 9 février dernier.
Le jugement : https://www.casemine.com/judgement/uk/65c912384122c40dea297434
Le déficit de la caisse des retraites de la partie racheté par SEMA était de 18.1M£ en 2019. Avec les intérêts frais d’avocats et équivalent anglais de l’article 700, exprimé en euros cela fait autour de 25M€, voir pages 15 et 99 du lien ci-dessous. Vous pouvez écrire au service juridique ou relation investisseurs d’Atos pour en savoir plus sur les montants.
https://www.casemine.com/judgement/uk/639f60b1b642790329c858df
ou sur la version Youtube du jugement (mais qui est très longue) :
https://www.youtube.com/live/vEskVKcNPCQ?si=ImLDicjQ9b8C7HJZ
Si l’on voulait faire de l’humour on pourrait dire que cela fait une perte de 9% par action vu la capitalisation actuelle, mais le jugement datant d’il y a 10 jours, il est probablement déjà dans les cours.
Entre l’accès à des bureaux Atos bloqués par le propriétaire pour loyers impayés et les voitures de quelques cadres mis sous séquestre également pour loyer impayés, décidément les relations avec la perfide Albion semblent tendues côté DAF Atos groupe.
Pour les passionnés uniquement un article à ce sujet : https://www.wilberforce.co.uk/case-study/recent-pensions-case-how-much-should-members-pay-in-a-shared-cost-db-scheme-railways-pension-trustee-v-atos-2022-ewhc-3236-ch/
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Avec nos remerciements pour le membre qui nous a relayé l’information.
Pour ceux qui veulent chercher le montant exact de l’arriéré, voici quelques éléments :
« Je ne suis pas sûr du chiffre exact, mais je suppose qu’il se chiffre en (dizaines) de millions, car cela aura été une affaire coûteuse à combattre, à faire appel et à perdre.
Ces passifs appartiennent désormais à ATOS et sont presque certainement la raison pour laquelle leurs états financiers 2022 sont déposés en retard auprès du HMRC (autorités fiscales).
La question de savoir si l’entité britannique est toujours « a going concern » deviendra peut-être plus claire une fois que celles-ci seront déposées – mais cela est basé sur 2022, pas 2023, et certainement pas 2024, donc c’est toujours obsolète.
Soit dit en passant, les pensions sont une « dette prouvable non garantie » qui n’a pas d’ancienneté élevée en cas d’insolvabilité, malheureusement pour ces employés – cependant, il existe un régime gouvernemental appelé « Fonds de protection des pensions » pour ces circonstances.
Voyez également ici, dans les documents déposés par l’entreprise auprès du HRMC, qu’elle facture des frais pour un « contrat d’achat de créances » avec la BNP.
https://find-and-update.company-information.service.gov.uk/company/01245534/filing-history
Recherchez l’« Registration of Charge » 20 Dec 2023
Il s’agit d’un prêt à court terme garanti contre des créances futures, un peu similaire à l’affacturage, je pense.
Je ne sais pas où se situe cette facilité de crédit en termes d’ancienneté, mais je suppose qu’elle serait garantie – c’est pourquoi une charge serait enregistrée auprès du HMRC.
Peut-être comprenez-vous mieux que moi ce type de facilité de crédit ? »
J’avoue que je vois cela comme un découvert autorisé. Décidément, BNP qui fait partie du pool prêteur des 1500M€ doit s’arracher les cheveux 🙂
Si Atos, ou des salariés anglais veulent apporter une précision, ils sont bienvenus. Vu qu’il semble que les cadres dirigeants d’Atos lisent le blog en même temps que leur café, ça m’évitera des emails (je précise qu’il ne s’agit pas d’une blague, je suis malheureusement et je trouve cela déplorable cité dans la moitié des calls internes).
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