CORYRIGHTS LE FIGARO –
ENQUÊTE – L’avionneur renonce à acheter les activités cybersécurité et big data d’Atos. Le groupe de l’informatique s’approche d’une restructuration de sa dette.
Véritable coup de tonnerre
Plus qu’une nouvelle interrogation, c’est un véritable coup de tonnerre qui s’est abattu sur Atos mardi. Entré en négociations exclusives il y a quelques semaines avec Airbus autour de la vente des activités cybersécurité et big data (BDS) du groupe français, le groupe présidé par Jean-Pierre Mustier a essuyé un refus de la part de l’avionneur. En Bourse, la nouvelle a été accueillie avec stupeur, le cours s’effondrant de près de 20 %. Atos, qui réalise 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires, vaut désormais moins de 200 millions d’euros.
« La décision a été soudaine », se désolait mardi un proche d’Atos. Ces dernières semaines, l’état-major se disait pourtant confiant sur la réussite du deal. « Il y a eu des centaines d’heures de réunions, des visites communes de sites. Il n’y avait aucun signal négatif », confie cette source. Lundi après-midi cependant, un point d’étape entre Airbus et Atos a été annulé. À l’issue d’un conseil d’administration chez l’avionneur, ce dernier a jeté l’éponge.
Insistance de Bercy
Selon deux sources au fait des négociations, ce retrait d’Airbus ne serait pas lié à une mésentente sur le prix – la fourchette de valorisation oscillait entre 1,5 milliard et 1,8 milliard d’euros – ou sur la valeur intrinsèque des actifs de BDS. « C’est un sujet de gouvernance propre à Airbus et de son actionnariat, que ce soit l’État allemand ou le fonds britannique TCI »,estime l’une d’elles. L’insistance de Bercy auprès de l’avionneur pour réaliser cette transaction aurait brusqué ces deux parties prenantes, jugeant que le rachat de BDS poursuivait un but politique plutôt qu’une stratégie industrielle.
Avec ce nouvel échec, moins d’un mois après celui des discussions avec Daniel Kretinsky pour le rachat de TechFoundations (regroupant les activités d’infogérance), c’est le plan de sauvetage concocté par le duo Jean-Pierre Mustier-Paul Saleh qui prend l’eau. Accablé par ses 5 milliards de dette dont 3,65 milliards à rembourser d’ici à 2025, Atos doit trouver de nouvelles pistes de cessions. « Toutes les options vont être remises sur la table, mais le groupe dispose de marques d’intérêts sur certains de ses actifs », veut croire l’entourage du groupe. Le mandat ad hoc, confié mi-janvier à l’administratrice judiciaire Hélène Bourbouloux pour faciliter les négociations avec le pool de 22 banques créancières d’Atos, prend une nouvelle tournure, vu la situation financière et l’absence de perspectives solides.
Dette nette de 2,2 milliards d’euros
Fin 2023, le groupe avait une dette nette de 2,2 milliards d’euros, laquelle respectait les ratios d’endettement annoncés à ses créanciers. Le sujet est crucial : la rupture de ce type de «covenants bancaires » peut entraîner l’exigibilité immédiate de la dette financière par les créanciers, que ne pourrait assumer Atos. Au 31 décembre, la société indiquait également avoir plus de 2,4 milliards d’euros de liquidités dans ses comptes, et s’affichait confiant dans sa capacité à passer l’année 2024. Le 28 février dernier, Atos avait repoussé de trois semaines la publication de l’intégralité de ses résultats annuels, citant un retard dans l’examen d’une charge de dépréciation sur l’un de ses actifs. Un tel report n’est pas inédit dans l’histoire d’une société française cotée mais pas anodin non plus. « C’est le symptôme d’un désaccord entre Atos et le commissaire aux comptes Deloitte sur cette dépréciation », assure une bonne connaisseuse de ce type de dossiers. Selon son analyse, la situation financière réelle du groupe est moins bonne que celle communiquée publiquement. « Les marchés s’accordent à dire qu’ils ont un recours massif et peu transparent à l’affacturage inversé. Autrement dit, ils demandent à un intermédiaire de régler les factures fournisseurs. Cela permet de diminuer le besoin en trésorerie, et la créance de la banque n’est pas calculée sur la dette nette », juge-t-elle.
Pas illégales, ces pratiques comptables soulagent une trésorerie visiblement sous tension. « Nous avons des retours des fournisseurs qui se plaignent beaucoup des retards de paiement. Certains ne se font payer que sous la menace d’une lettre d’avocat », abonde une cadre d’Eviden, l’autre entité d’Atos avec TechFoundations. L’arrêt des négociations avec Airbus pourrait entraîner un petit vent de panique, selon certains : « Si les intermédiaires ne suivent plus sur l’affacturage, il y a un risque d’explosion du besoin en fonds de roulement. Qui payera les fournisseurs ? La spirale peut être catastrophique », estime un acteur du monde du crédit. Atos se refuse à tout commentaire sur ses pratiques comptables, et a repoussé une nouvelle fois la publication de ses résultats annuels.
Situation critique
La situation semble néanmoins critique. Il y a encore quelques semaines, certaines voix s’accrochaient à un scénario dans lequel les banques créancières d’Atos accepteraient de repousser leurs maturités de dette à moyen terme. Aujourd’hui, la restructuration de tout ou partie de cet endettement semble inévitable. « Je ne vois pas comment ils vont échapper à une sauvegarde judiciaire », confie un connaisseur du monde des affaires parisien. Cette procédure pourrait déboucher, comme dans le cas de Casino, sur l’écrasement de la dette des créanciers en contrepartie d’actions du groupe. Mais ce scénario – où les actionnaires actuels du groupe seraient très fortement dilués – suppose également l’arrivée d’un investisseur porteur d’un projet industriel.
Qui sera le prétendant ? Trois noms reviennent avec insistance autour d’Atos. David Layani est le premier d’entre eux. Arrivé au capital à l’automne, le fondateur et PDG de OnePoint est devenu son actionnaire de référence avec 11,4 % du capital. L’homme d’affaires voit le potentiel de synergie avec certaines activités d’Atos dans les services numériques. Selon nos informations, il chercherait à récupérer la totalité d’Atos, avec un projet visant à repousser une partie de la dette et à en écraser une autre. « Il a le soutien des hedge funds, porteurs de dette obligataire », estime une source au fait des négociations. Il a aussi celui du syndicat majoritaire, la CFE-CGC, : « Le projet porté par David Layani est aujourd’hui le seul à pouvoir sauver Atos et à conserver son caractère intégré», explique Karine Dran. Sur les rangs se trouve également le canadien CGI. Concurrent direct de OnePoint, cet acteur des services numériques a manifesté en janvier une marque d’intérêt auprès d’Atos pour la reprise des activités digitales uniquement.
Un retour de Daniel Kretinsky ?
Enfin, le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, qui n’a pas réussi à acheter TechFoundations, pourrait revenir par la fenêtre, comme sur le dossier Casino.« Les activités d’infogérance l’intéressent toujours. Il peut faire une offre globale sur Atos pour revendre ensuite par appartement. Mais, d’une part, il attendra qu’on vienne le chercher et, d’autre part, il ne faut pas que ce soit trop tard, pour éviter que les actifs ne pourrissent trop », insiste un banquier. Pour ajouter à la complexité du dossier, Atos doit prendre en compte les lignes rouges fixées par l’État, qui participe directement aux négociations entre la direction, les créanciers et le mandataire ad hoc.
Mardi soir, le ministère de l’Économie a annoncé qu’il allait construire une «solution nationale de protection des activités stratégiques » logées chez BDS. L’exécutif redoute que les supercalculateurs qui servent à la dissuasion nucléaire française, tombent dans l’escarcelle d’un groupe étranger. Autrement dit, il faudra trouver un acheteur tricolore, public ou privé, pour ces activités.
https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/avec-le-retrait-d-airbus-atos-au-bord-du-precipice-20240319
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Si vous avez subi d’énormes pertes sur Atos, sachez qu’une action en réparation est en cours de constitution sur le site Upra.fr (l’Union Pour la Réparation des Actionnaires), pour recouvrer une partie de vos pertes par voie de justice. Cette action sera totalement gratuite pour les plaignants si nous arrivons à trouver le financement auprès de fonds et l’UPRA ne vous demandera aucun paiement ni cotisation ou autres.
Afin de ne pas déstabiliser la société, cette action ne visera ni Atos, ni ses dirigeants ou ex-dirigeants, mais uniquement ses auditeurs (commissaires aux comptes) en particulier DELOITTE supposé être le n°1 mondial de l’audit, mais que l’UPRA soupçonne avoir été très complaisant vis-à-vis d’Atos avec les règles comptables en vigueur, et avoir fait manquer une chance aux actionnaires de ne pas acheter l’action quand elle était surcotée vis-à-vis de sa réelle valeur et manque une chance d’avoir vendu, quand la société s’effondrait et que la comptabilité ne reflétait pas cet effondrement, en particulier une absence totale de dépréciation d’actifs.
Pour des raisons de coûts de procédure, elle est réservée aux personnes ayant subi des pertes supérieures à 10 000€, sinon les coûts judiciaires, avocats, expertises, etc… en millions d’euros seraient supérieurs à la perte et ne seraient pas rentables pour le fonds qui financera ce recours. Soyez assuré qu’il ne s’agit pas de snobisme, mais réellement de contraintes financières.
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