Le groupe français ASTEK exprime son intérêt pour l’achat d’Evidian (LE JDD)

INFO JDD. Le groupe français spécialisé en ingénierie Astek s’est positionné pour le rachat d’Evidian, une entité du groupe Atos. Cette vente doit permettre la remise à flot d’Atos.

Sylvie Andreau, Mis à jour le 

Le feuilleton va durer jusqu’à l’été et probablement au-delà. Plusieurs protagonistes sont déjà entrés en scène. Certains ont fait une apparition fugace, d’autres patientent en coulisses. Quelque part entre Le Bureau des légendes et Tonnerre sous les tropiques, la cession d’un pan du groupe Atos agite à la fois l’industrie, le secteur de la tech, la défense nationale et la classe politique. Édouard Philippe a rejoint à l’automne 2020 le groupe que Thierry Breton a dirigé pendant dix ans. Sa voix va compter et sa responsabilité sera engagée dans cette vente complexe sous haute surveillance. La cession d’Evidian, nom donné à l’entité mise en vente, concerne des activités stratégiques notamment dans la cybersécurité et pour la dissuasion nucléaire. Elle doit permettre la remise à flot d’Atos, 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires l’an dernier et 110 000 salariés.

Ce week-end, un nouveau candidat se lance à son tour dans la bataille. Le français Astek vient de faire part au conseil d’Atos de son intérêt pour Evidian. Depuis plusieurs semaines, un petit groupe de « patriotes », comme ils se présentent, tous polytechniciens, pilote la candidature d’Astek. Avec 7 000 salariés, 500 millions d’euros de chiffre d’affaires, 40 % de croissance l’an dernier, l’expert en transformation numérique se sent taillé pour l’aventure. « L’idée est d’avoir accès aux informations sur le business d’Atos, de regarder dans la boîte pour faire une offre cohérente », explique Julien Gavaldon, président d’Astek.

 

Un découpage qui soulève des interrogations

Avoir une idée précise de la situation d’Atos n’a rien de facile. En juin, la présentation d’une nouvelle stratégie centrée sur un plan de scission a provoqué le départ du directeur général, Rodolphe ­Belmer, aujourd’hui patron de TF1. Ce changement de cap et la dégringolade de l’action ont aussi réveillé le fonds activiste ­Sycomore. L’actionnaire minoritaire réclame la démission du président du groupe, Bertrand Meunier, et le remplacement des membres les plus anciens du conseil d’administration par des spécialistes du secteur.

Le découpage imaginé par le conseil soulève des interrogations. La valorisation du nouvel ensemble, autour de 7 milliards d’euros, laisse sceptique. Elle semble correspondre au montant estimé par Atos pour mener à bien sa restructuration et son désendettement. « Voilà ce qui arrive quand on laisse des gens qui ne savent même pas changer les piles d’une télécommande diriger un leader de la tech », persifle un proche du dossier.

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En septembre, Onepoint est le premier à se présenter en repreneur. Le groupe de conseil en technologie se dit prêt à mettre sur la table 4,2 milliards d’euros. ­Bertrand Meunier ne juge pas l’offre pertinente. David Layani, patron de Onepoint, doit passer son chemin mais s’est offert « un super coup de pub », jugeront certains. La semaine dernière, Airbus confirme à son tour avoir ouvert des discussions avec Atos. Plusieurs des business mis en vente, notamment dans les communications sécurisées, intéressent l’avionneur pour sa branche défense. Enfin, un autre grand acteur industriel français joue un jeu plus ambigu : Thales. Officiellement, le groupe de Patrice Caine ne veut pas de l’opération ni surtout du prix aujourd’hui avancé par le vendeur. Mais là encore, difficile de croire que le portefeuille d’Evidian ne lui offre rien d’intéressant.

Big data, cybersécurité, systèmes de communications cryptées, supercalculateurs, etc. : on y trouve un peu de tout. Créé en 1997, le groupe Atos s’est bâti à coups d’acquisitions avec celles de Bull, des activités IT de Siemens, d’une entreprise américaine disposant de centres offshore en Inde. À l’époque, Thierry Breton ambitionne de créer un Airbus européen des services informatiques. S’il échoue dans son OPA sur Gemalto, Atos couronne sa trajectoire en intégrant le CAC 40. En 2021, un avertissement sur résultats et un refus des commissaires de certifier les comptes précipitent le français dans le chaos.

Julien Gavaldon n’a pas l’intention de reprendre l’intégralité d’Evidian. Il a réuni autour de lui plusieurs spécialistes, comme ChapsVision, un groupe étatique, est en pourparlers avec de gros industriels. Tous veulent regarder ce qu’Atos a mis dans la corbeille et éviter de payer le prix fort. Des partenaires financiers comme ­Eurazeo, Tikehau et Ardian ont également été approchés. Seul critère de sélection : qu’ils soient français. Astek revendique une opération patriotique.

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