L’image d’Atos auprès des marchés est désormais sérieusement altérée (Le Monde)

Le Monde, Publié le 02 avril 2021 à 11h09

La non-certification d’une partie de ses comptes a entraîné la chute de 12,4 % du cours de Bourse de l’entreprise, dont les récentes aventures avaient déjà refroidi les investisseurs. Sa spécialisation lui offre pourtant de belles perspectives de croissance, explique Philippe Escande, éditorialiste économique au « Monde ».

La réputation est chose fragile, simple à garder, si difficile à reconquérir. Il faudra des mois, peut-être des années, à Atos pour effacer l’affront de ces dernières vingt-quatre heures. A l’issue d’un conseil d’administration tenu mercredi 31 mars pour approuver les comptes de l’exercice 2020, la société a dû reconnaître que ses auditeurs s’étaient refusés à les certifier dans leur totalité. La sanction n’a pas tardé. Jeudi 1er avril, le cours de Bourse de la société de service informatique s’est effondré de plus de 15 %, avant de clôturer en chute de 12,4 %.
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Ce n’est pas l’affaire du siècle, mais un fait rarissime pour une entreprise du CAC40. Les auditeurs, Deloitte et Grant Thornton, n’ont pas voulu prendre de risques. La profession a essuyé suffisamment d’accusations de négligence coupable ces dernières années (comme Wirecard en Allemagne en 2020) pour ne prendre aucun risque. En l’occurrence, les experts ne sont pas d’accord avec le calcul du chiffre d’affaires de deux filiales américaines de l’entreprise. Celles-ci représentent tout de même 11 % des revenus d’Atos.

Possible sortie du CAC40

La firme a diligenté une contre-expertise pour trouver la source de cette erreur, mais trop tard. D’autant que la société, parmi les premières entreprises de services informatiques en Europe, n’est pas réputée pour la clarté de ses comptes, et que ses récentes aventures ont refroidi les investisseurs. En janvier, à la surprise générale, elle avait proposé de racheter l’ancienne activité services de Hewlett-Packard, rebaptisée DXC, avant de renoncer face au refus de cette dernière. La Bourse n’avait compris ni l’intérêt du Français pour cette vieille gloire en déclin, ni son retrait soudain.

Pourtant, les fondamentaux d’Atos sont bons et sa spécialisation dans la cybersécurité, le big data et le cloud computing, lui offre de belles perspectives de croissance. Plusieurs analystes, comme ceux d’Alphavalue, sont positifs sur le titre, tout en reconnaissant que l’image du groupe est sérieusement altérée. Avec une capitalisation boursière de 6,3 milliards d’euros, la firme est, de loin, la dernière du CAC40 et pourrait bien en sortir à la prochaine révision de l’indice. Elle vaut aujourd’hui trois fois moins cher que sa filiale de paiement Worldline, dont elle est sortie totalement en 2019.

Cette mauvaise réputation est fâcheuse pour une entreprise dont le modèle de croissance est largement fondé, depuis sa création en 1997, sur les acquisitions, écumant d’abord dans toute l’Europe les services informatiques dont ne veulent plus les grands groupes, dont ceux de Siemens en 2011, sans oublier Bull en 2014, et plus récemment, en 2018, l’américain Syntel. Un modèle rodé mais qui ne favorise pas la stabilité et la lecture des comptes. Poids moyens dans un univers de géants, Atos se sent condamnée à l’agitation permanente.

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