Evidian, c’est carrément évident pour Airbus sur le plan stratégique. A condition de conclure un accord stratégique qui permette à l’avenir aux deux groupes de présenter des offres conjointes sur l’ensemble du périmètre d’Evidian et de partager des synergies de développements et d’infrastructures.
A la fois très proche, à la fois encore très loin. Très proche parce qu’Airbus a identifié un vrai sens stratégique à se rapprocher d’Evidian, l’entité qui va rassembler les activités les plus prometteuses d’Atos (cybersécurité, data, quantique, calcul à haute puissance…) après sa scission (spin-off) au second semestre 2023. Et l’accord stratégique en négociations entre Airbus et Evidian est très avancé, selon nos informations. Très loin en revanche car récemment encore le constructeur attendait d’avoir accès aux comptes d’Evidian, qui a enregistré un chiffre d’affaires de 5,3 milliards d’euros et une marge opérationnelle de 276 millions (5,2% du chiffre d’affaires). « On ne peut pas imaginer Airbus aller vers un accord sans que le groupe aéronautique comprenne bien ce qu’il y a sous le capot d’Evidian », assure une source proche du dossier à La Tribune.
Autrement dit, tant qu’Airbus n’aura pas étudié dans le détail les contrats, la base de coûts et les comptes d’Evidian (due diligence), le constructeur ne s’engagera pas de façon ferme et irrévocable à acquérir les 29,9% du capital d’Evidian. D’autant que les discussions en cours entre Atos et Airbus sont sur une base non-exclusive. Entre Evidian, sous la tutelle d’Atos, et le conquérant Airbus, c’est la période de flirt mais aussi de découverte. On pense déjà aux fiançailles et plus si affinité, mais on ne veut pas s’engager à la légère. D’autant que le géant européen devra se montrer peut-être généreux pour convoler vers un ménage à trois.
Importance du digital pour Airbus
Pour autant, Airbus a une folle envie d’Evidian et croit dur comme du fer à son succès. Atos était déjà un partenaire historique du groupe européen. « On va dans un monde qui est très digital, très numérique à la fois dans le domaine de la connectivité, de l’utilisation des données, de la sécurisation des données, du calcul de haute intensité sur la simulation (arrivée du quantum computing). Toutes ces technologies sont des technologies très importantes pour Airbus », a lâché Guillaume Faury à quelques journalistes à l’issue de la conférence de presse sur la présentation des résultats du géant européen. Des propos qui n’étaient finalement pas aussi convenus que cela sur l’importance du digital pour Airbus.
Pourquoi ? Parce que le calcul de haute intensité (HPC) intéresse très fortement Airbus, dont les besoins en simulation vont être multipliés par cinq à l’horizon de cinq à dix ans. Ils seront multipliés jusqu’à 25 fois lors de périodes de pic. Le constructeur est déjà un consommateur très important de simulations. Il sera encore plus addict à l’avenir. Résultat, l’utilisation du calcul intensif est très importante pour toute la simulation réalisée par Airbus aujourd’hui mais aussi demain. Le rapprochement avec Evidian lui permettra de combler une très grande partie de ses besoins en la matière de façon beaucoup plus rationnelle et plus structurée qu’aujourd’hui et surtout d’être prioritaire en raison de l’accord stratégique qui liera en principe les deux entreprises.
« C’est donc l’ensemble du portefeuille d’Evidian qui a du sens pour Airbus », décrypte un bon observateur de ce dossier. C’est ce qui a fait la différence entre Airbus et Thales, qui a longtemps reniflé Evidian et qui a renoncé. Si le groupe présidé par Patrice Caine a fait l’analyse qu’il n’y a qu’une partie d’Evidian (Big Data et Sécurité – BDS), qui l’intéresse – soit 30 % environ d’Evidian -, « cette société est effectivement un problème pour Thales », analyse-t-on. En revanche, pour Airbus présidé par Guillaume Faury, Evidian est une solution. Tout ou presque intéresse le constructeur, de la cyber au High Power Computing (HPC) en passant par le cloud privé, public ou souverain, les datas, la cryptologie…
Airbus, actionnaire de référence ?
Pour Airbus, la problématique fondamentale a été de trouver du sens stratégique à un investissement financier dans une société dont il n’aura pas le contrôle (29,9%) mais dont il souhaite devenir un actionnaire de référence. C’est d’ailleurs l’objectif crucial de l’accord stratégique en négociations entre Airbus et Evidian. « Cet accord doit trouver beaucoup de substances sur l’ensemble des métiers d’Evidian en termes de synergies et de complémentarités pour Airbus », explique cette source proche du dossier. Ces deux conditions sine qua non doivent être remplies pour que cette opération prenne tout son sens pour Airbus.
Mais qu’est-ce que cela veut-il dire concrètement pour Airbus et Evidian ? L’objectif des deux groupes en travaillant étroitement ensemble est de faire croître le chiffre d’affaires des activités concernées grâce à des offres conjointes que les deux groupes n’étaient pas capables de faire séparément. Une alliance qui pourrait par ailleurs devenir un rival plus féroce pour Thales, qui est régulièrement en concurrence contre Atos. Cet accord stratégique permettrait également de réaliser des synergies poussées entre les deux groupes sur les développements des produits, les infrastructures… en partageant les coûts. « Ensemble les deux sociétés seront beaucoup plus performantes en partageant le fruit des investissements et les mises en commun », assure un bon observateur du dossier. Ce qui pourrait rassurer le fonds d’investissement activiste britannique TCI, très sceptique sur cette opération. TCI et Airbus se sont d’ailleurs vus pour en discuter.
Résultat, Airbus pourrait transformer un investissement financier en une véritable machine de guerre dans le digital mais aussi devenir une machine à cash. Même avec que 30%, Airbus est preneur. D’autant qu’il ne faut jamais insulter l’avenir. Mais cette opération n’est possible qu’à travers une coopération stratégique à grande échelle entre Airbus et Evidian. C’est ce que souhaite de toute évidence Airbus. C’est d’ailleurs en passe d’être réglé. Viendra encore à traiter la question du prix des 29,9%. Il reste donc encore du boulot…
https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/pourquoi-airbus-en-pince-vraiment-pour-evidian-953215.html
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Bof, un enfilage de platitudes.
J’aime bien M. Cabirol mais vu le large spectre de ses interventions à la Tribune, il a une certaine tendance à adopter « une vue d’hélicoptère » (anglicisme difficilement traduisible) sur les différents sujets, se contentant de synthèses « bon enfant » saupoudrées de vagues lieux communs glanés auprès de « bons connaisseurs du dossier ».
Il est bien meilleur journaliste sur les contrats militaires où il dispose, je l’avoue, de bonnes sources qui lui font sortir des bonnes infos souvent en avance sur les autres.
Mais pour revenir à l’article, je note qu’un point clef qu’il relève lui-même ne semble pas l’intriguer du tout, ni le déranger le moins du monde.
Le fait qu’une éventuelle association Airbus/Evidian puisse représenter un concurrent « féroce », « stratégique » pour Thales.
Et que Thalès, en pleine forme financière, en pleine croissance et bien tenue par un patron conquérant, semble à présent se désintéresser complètement d’une affaire qu’il avait pourtant convoité il y a moins d’un an.
On aurait aimé que M. Cabirol aille consulter d’autres « bons connaisseurs du dossier » de ce côté la aussi. Creuser davantage plutôt que de se reposer sur ses habituelles sources et autres experts non identifiés.