Sauvegarde Atos : Les bidouillages de DARROIS à 20M€ [Article-blog] + [Article Les Echos]

Paris, 21 janvier 2020 Maitre Jean-Michel Darrois, + 7 associés. De gauche à droite : Christophe Ingrain (assis), Bertrand Cardi, Alain Maillot, Marcus Billam, Carine Dupeyron, Jean-Michel Darrois, Emmanuel Brochier,Cyril Bonan.

 

Le blog a décidé de publier ici un leaks de Darrois, à savoir un email interne qui nous a été transféré par un cadre mécontent, pour montrer les « bidouillages » [expression volontairement très caricaturale, mais à mettre en regard des honoraires, eux, non caricaturaux] que peut réaliser ce cabinet dont le CA facturé à Atos en 2024 aura été plus de 20% du CA de la firme parisienne.

Darrois est selon Les Echos, le cabinet le plus rentable de Paris, voir article Les Echos en fin de première « partie blog », et les honoraires facturés à Atos vont dans le sens de l’article des Echos.

Selon l’expérience du blog, certains honoraires de ce type de cabinet, notamment lorsque certaines missions sont confiées à des « partners » peut aller jusqu’à 1500€ de l’heure et 1000€ de l’heure pour des associés. Mais lorsqu’il s’agit d’un des 4 fondateurs, là ça peut monter bien bien plus haut et ça reste confidentiel. Mais comme disait Rockfeller, « si on demande le prix de quelque chose ça veut dire qu’on est pas capable de se le payer ».

Même si le nom du cabinet est « Darrois Villey Maillot Brochier », sur la place Parisienne on dit « DARROIS » tout court tant l’homme qui a défendu Fabius dans l’affaire du sang contaminé, est un des « parrains » du barreau parisien, titre à prendre bien-sûr au sens figuré et qui est le même que l’on prêtait à Claude Bébéar d’Axa, au moment de l’affaire Vivendi.

Même si ces termes mafieux sont des paraboles, il faut toujours se demander pourquoi elles sont utilisées. Est-ce pour décrire une grosse sphère d’influence ou un réel POUVOIR dans l’establishment parisien…. ?

Darrois est un gros cabinet à l’échelle parisienne probablement dans le top 10, mais comme l’a évoqué LA LETTRE ils sont 17ème à l’échelle française. Comme expliquer une telle influence ?

 

Mais surtout comment expliquer cette influence de DARROIS au sein d’Atos ? A

A un tel point que durant l’été 2023 Darrois selon des témoignages du service juridique a imposé le black out au DG groupe Mr Bihmane et à la DGA Madame Galbe quant au souhait de faire une opération de transparence sur leurs incentives dont un média en particulier a raconté n’importe quoi.

L’article Des Echos en fin d’article accorde un élément de réponse :

Malheur en revanche à ceux qui un jour vont voir ailleurs : « Si vous travaillez avec lui, ne me rappelez jamais », aurait-il ainsi lancé à un patron qui avait l’outrecuidance de chercher une seconde opinion.

Il y aurait donc une clause d’exclusivité tacite à vis avec Darrois ?

Est-ce que Jean-Michel Darrois a répété cette phrase à Jean-Pierre Mustier lorsqu’il a pris la succession d’un Bertrand Meunier totalement addict ? Toujours est-il que zéro pointé en 2021, de 5.5M€ de CA en 2022, 12M€ en 2023 et 20M€ jusqu’à octobre 2024, novembre et décembre restant inconnus du blog, les honoraires de Darrois chez Atos connaissent une ascension fulgurante qui ne dément pas l’article des Echos en fin d’article, faisant de Darrois le cabinet le plus rentable de France.

Sous l’ère Breton, puis d’Elie Girard, c’est la branche Juridique d’E&Y qui avait les faveurs du management d’Atos. Puis DARROIS est entré par la grande porte en 2022, puisque de zéro honoraires trouvés dans les comptes 2020 ou 2021, on passe à 5.44M€ en 2022.

Le gros lot fut la conciliation et le plan de sauvegarde accéléré où l’on se demande bien pourquoi Atos est allé chercher Hélène Bourbouloux [pour rappel, le mandataire Ad Hoc ou le mandataire conciliateur est choisi par la société. Seuls les administrateurs judiciaire et le mandataire judiciaire, sont choisis par le tribunal (à priori et sous réserve de vérification, mais probablement sur proposition de la société) ].

Or Hélène Bourbouloux travaille avec la célèbre firme Hogan Lowells pour les points particuliers de ses restructurations qui nécessitent le travail d’avocats. Il est donc étonnant de voir qu’en Juin au moment du choix des repreneurs Hogan Lowells était provisionné 800,000€ d’honoraires, cabinet dont le sérieux n’est pas à remettre en cause puisque 8ème firme française et que curieusement au 31 octobre, seuls 78600€ d’honoraires avaient été facturés.

Il semblerait, mais il ne s’agit là que d’une réflexion du blog et nous n’avons aucune information à ce sujet, il semblerait donc que Darrois ait imposé à Hélène Bourbouloux ses équipes plutôt que celles de Hogan Lowells avec qui elle a pourtant l’habitude de travailler. Et sur une restructuration de cette taille, être privé de l’appui de ses équipes d’avocats habituelle c’est une sacrée épreuve.

 

On notera au passage, et ceci n’a par contre strictement rien à voir avec Darrois, que Me Bourbouloux est rénuméré en sus du taux horaire par des discretionary fees. Si certains membres sont habitués à ce type de procédures, qu’ils n’hésitent pas à me contacter pour me dire si c’est l’usage. admin@bourse.blog

L’éventuel court-circuitage de Hogans Lewell par Darrois pourrait expliquer pourquoi dans le même document le budget de Darrois sur l’année 2024 est à 18M€ et le réalisé au 31 octobre est de 20.1M€ (sous réserve qu’il s’agisse d’un montant  HT, on ne peut pas trop en demander au lanceur d’alerte de l’opération d’Artagnan).

 

Compte tenu de l’importance pris par Darrois dans les honoraires des conseils d’Atos tant du pourcentage du CA de la firme Darrois, on peut vraisemblablement se demander si après le départ de Belmer, avec avec un Meunier ayant mis sous tutelle ses DG et avoir fait des DGA, Darrois n’est pas devenu aussi en collaboration un des dirigeants de fait d’Atos et que Meunier étant devenu « camé » à Darrois et Mustier aussi apparemment, que Darrois ait eu la main lourde.

Un salarié d’Atos m’a conté une fois que Meunier était toute la journée au téléphone avec ses avocats…

Bien sûr cette théorie de possible ABS (abus de bien social) en tant que dirigeant de faits d’Atos, que vous avons évoqué et qui a ce stade n’est qu’une simple hypothèse de réflexion et que seul un juge après des mois et des moin d’enquêtes pourrait dire si tel était le cas, prend néanmoins un peu de corps si Darrois avait bel et bien mis sur la touche les avocats d’Hélène Bourbouloux.

Passons donc maintenant au Leaks et au titre caricatural de l’article, qui, vous l’aurez compris, est à prendre au second degré. Un cadre d’Atos nous l’a forwardé avec la remarque suivante :

« C’est quand même étonnant de voir que le 11 decembre alors que le plan est bouclé depuis des semaines, à savoir par la validation du tribunal de Nanterre le 24 octobre et les nouvelles actions allant être émise le 16 décembre pour être livrées le 18 octobre, qu’on en est encore en négo du financement. »

Ce n’est pas la raison principale pour laquelle le blog a décidé de publier ce leak. Comme les créanciers backstoppeurs espéraient que l’AK soit souscrite en totalité par les petits porteurs et que devant l’échec total de la souscription (29% de PP) et qu’ils ont donc du amener 75M€ de leur poche en cash frais, il est possible qu’ils aient  demandé à réduire d’autant leur apport au Loan Term 1L. Compte tenu des 507 pages du plan de sauvegarde nous ne savons pas si ce cas de figure était prévu, donc ceux de nos lecteurs qui ont lu les 507 pages pourront nous faire par de leur point de vue admin@bourse.blog

Non la raison pour laquelle nous avons publié ce leak est à cause du bidouillage apparent de l’équipe Darrois en charge de la révision du 1L Loan, avec en particulier la phrase suivante :

Est-ce OK de donner la CP à la signature ci-après (c’est un peu bizarre de faire référence à un process agent qui sera désigné pour une sûreté donnée au tirage). Est-ce qu’on aura une réso/un document de l’entité qui sera désignée Process Agent ?

C’est donc totalement hallucinant de voir que Me Maxime Garcia s’interroge lui même de la bizarreté de la procédure. Et on peut se demander si ici Bizarre ne veut pas dire légal? Si des lecteurs ont une idée : admin@bourse.blog

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LEAK ATOS.BOURSE

De : Maxime GARCIA <mgarcia@darrois.com>
Envoyé : mercredi 11 décembre 2024 00:10
À : Severin, Ioana <Ioana.Severin@bakermckenzie.com>; EDWIGE BERGER <edwige.berger@atos.net>
Cc : Martin LEBEUF <mlebeuf@darrois.com>; Sami TAREB <stareb@darrois.com>; Sauty de Chalon, Alain <Alain.SautydeChalon@bakermckenzie.com>; Basso, Gonzague <Gonzague.Basso@bakermckenzie.com>; Berruyer, Damien <Damien.Berruyer@bakermckenzie.com>
Objet : RE: Alpha – France – security package – (1L TL)

Ioana,

Voici ci-joint la nouvelle version du 1L Term Loan transmise par Gibson (sous réserve des commentaires des banques et des BH),

Cette version actualisée est transmise pour information et nous n’attendons pas d’autres commentaires (hormis les US et les UK qui sont en cours de finalisation).

Il faudrait néanmoins la confirmation que les clauses et les annexes revues par les correspondants locaux correspondent à ce qui a été convenu avec Ashurst en local.

Quelques points à noter concernant les CPs :

  • ajout d’une nouvelle CP à la signature concernant les works councils (il me semble que le process était OK au sein des différentes filiales mais à confirmer @EDWIGE BERGER qu’il n’y a pas de sujets à l’accepter) :

If applicable, a copy of the positive advice of each works council or staff meeting (personeelsvergadering) with jurisdiction over the entry into the Transaction Security Documents and the performance of the obligations thereunder. [GDC note: Darrois/BMK to confirm whether necessary]

  • Est-ce OK de donner la CP à la signature ci-après (j’imagine que oui si les statuts sont modifiés cette semaine avec le reste des résolutions) ? : A copy of a special resolution of Eviden Technology Services Limited making such amendments to its articles of association as is required by the Security Agent in connection with the Jersey Security Document.

Est-ce OK de donner la CP à la signature ci-après (c’est un peu bizarre de faire référence à un process agent qui sera désigné pour une sûreté donnée au tirage). Est-ce qu’on aura une réso/un document de l’entité qui sera désignée Process Agent ? Evidence that the process agent referred to in the share charge relating to Atos Information Technology HK Limited has accepted its appointment.

Bien à vous,

Maxime

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Commentaire de Texte :

Qu’est-ce que l’acronyme « CP » ?

Il peut avoir plusieurs sens, mais ici cela semble être CLOSING PAPER.

Pourquoi Maxime Gallois emploie à un moment le féminin « la CP ». La traduction dans ce contexte de « paper » est « documentation ». D’où « la CP ».

HB signifie Bond Holders (fonds obligataires) quand au reste du texte si un lecteur juriste et financier avait la gentillesse de nous le traduire en langage vulgarisé, ce serait avec plaisir. Si je ne me cache pas être un spécialiste du dossier Atos, je n’ai jamais prétendu ni être juriste ni fiscaliste. admin@bourse.blog

Vous avez pu lire l’article du blog sur la défiscalisation de l’ensemble des filiales dans un montage avec délocalisation aux Pays-Bas sous droit luxembourgeois. (Lire l’article blog qui a révélé l’affaire) ainsi que ceux de Capital et OFF Investigation.

La Hollande a une fiscalité plus souple que la France, même si on ne peut pas proprement parler de paradis fiscal au sens premier du terme. Par contre les iles anglo-normandes, elles, sont considérées comme un paradis fiscal.

Or dans ce Maxime Gallois fait référence à Jersey Security Document, donc on peut vraisemblablement penser à un firme basée dans les iles de Jersey & Gernesey.

En terme de timing, c’est vraiment désolant pour des honoraires qui devraient à la fin de la restructuration monter autour de 25M€, de voir l’expression « hormis les US et les UK qui sont en cours de finalisation ».

Même si les avocats n’ont qu’une obligation de moyen en général, sauf en terme de fiscalité, et à cinq semaine du closing, si on enlève la trêve des confiseurs, on est plus les USA et les UK ne sont pas encore prêts. S’agit-il du plan de sauvegarde ou du plan de « défiscalisation » aux Pays-Bas, dur de deviner… Ce qui est sûr c’est que le term loan 1L, lui est encore en cours de modification presque 2 mois après le jugement du plan de sauvegarde.

Sauf accélération en dernière ligne droite, nous voyons plus le closing vers le 10 février que vers le 31 janvier,c e qui n’aurait rien de surprenant chez Atos.

Mais ne soyons pas mauvaise langue et donnons le bénéfice de la bonne foi à l’équipe de restructuration. Après tout, ils n’ont eu que 12 jours de retard sur la signature de l’accord de Lock-Up en Juillet et on tenu la date du 22 juillet pour l’entrée en sauvegarde accélérée.

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DISCLAIMER : à propos de la totale indépendance éditoriale du blog vis-à-vis de l’UPRA.

Mon rôle de président de l’UPRA est de fédérer et d’informer les plaignants de la class action à la française menée par l’UPRA qui en a confié la partie juridique au cabinet Vermeille. Dans la lettre d’engagement du cabinet Vermeille, ce dernier se réserve un droit de regard sur la communication de l’UPRA pour veiller au bon déroulement de la procédure, et réciproquement, avec dans un premier temps le recrutement du fonds partenaire de contentieux, puis de la mise en œuvre de la procédure de réparation contre les auditeurs.

Le cabinet Vermeille n’est pas tenu informé des articles du blog qui ne concernent pas l’UPRA et qui sont sous l’entière et unique responsabilité de la directrice de la publication du blog Atos.Bourse, Madame Darika Phoosoong.

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– COPYRIGHTS LES ECHOS –

Jean-Michel Darrois, l’avocat qui murmure à l’oreille des patrons

L’ancien champion de boxe a inventé avec son cabinet DVMB un style à part, une manière de travailler le droit. Rendu célèbre par certaines des plus grosses OPA des années 1990, il maintient toujours une rentabilité record. Mais doit aujourd’hui réfléchir au passage de relais.

Par Valérie de Senneville

Publié le 14 févr. 2020 à 07:00
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Il cultive son image de dilettante, un sourire discret plaqué sur son visage perpétuellement bronzé… comme un écran total. Rien ne filtre. Et pourtant, tout semble avoir été dit sur Jean-Michel Darrois, « l’avocat qui murmure à l’oreille des patrons ». Un storytelling juridique bien rodé qui met en scène l’émergence d’un avocat d’affaires influent à la faveur du boom des grandes OPA du début des années 1990. C’est simple, pratique et ça ne demande pas beaucoup d’introspection.

Mais qui peut croire que c’est en jouant au golf que Jean-Michel Darrois, aujourd’hui âgé de 72 ans, a bâti l’un des cabinets les plus rentables de France ? Quel est le secret de fabrication d’une des plus belles marques de la place , au point que l’on ait oublié son prénom en chemin ? On parle désormais de « Darrois » comme d’une certaine façon de travailler le droit, comme l’on dirait d’un tailleur de pierre, à la fois artisan et expert.

« C’est marrant vos questions, je ne me les suis jamais posées comme ça, c’est presque une psychanalyse du cabinet », éclate de rire une nouvelle associée quand on lui demande de définir l’ADN de la structure. En trois décennies, le cabinet a évolué mais pas vraiment changé. L’esprit de la petite équipe solidaire et baroque qui s’est installée, en 1987, au quatrième étage du 69, avenue Victor Hugo à Paris, est toujours là. Le cabinet n’a jamais quitté cette adresse, achetant de nouveaux étages au fil de sa croissance.

Un des cabinets les plus rentables de Paris

En ces années 1990 foisonnantes , le bureau de Jean-Michel Darrois donne sur la cour, encombré d’oeuvres d’art hétéroclites, accumulées au gré des humeurs et des amours de ce collectionneur. De l’autre côté du couloir, le bureau de Marie-Noëlle Dompé, ancienne magistrate passée par la COB (la Commission des opérations de Bourse, qui deviendra l’Autorité des marchés financiers) qui a rejoint le cabinet en 1995, ouvre sur le boulevard. Son cocker – le chien le plus initié de Paris – somnole en général dans un coin. À côté, l’antre de Philippe Villey et, au fond du couloir, les cloîtres d’Alain Maillot et d’Emmanuel Brochier.

Aujourd’hui, le cabinet Darrois Villey Maillot Brochier (DVMB) a conquis cinq étages mais le bureau de Jean-Michel Darrois n’a pas bougé. Tout juste s’est-il rempli de nouveaux objets : Léger a laissé place à Bonnard ; le cendrier où fumait constamment une cigarette a disparu, mais l’imposante statue africaine du dieu de la pluie continue de vous observer. « À l’époque, on s’était serré la main et on s’est juré que nous ne serions jamais plus de quinze avocats », se souvient Emmanuel Brochier.

Depuis, Philippe Villey est décédé brutalement en septembre 2012 et Marie-Noëlle Dompé a décidé de lever de pied. Aujourd’hui, le cabinet compte 26 associés et 49 collaborateurs pour 80,5 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2018, dernier exercice connu (source : Radiographie des cabinets d’avocats, Juristes Associés). Ce qui en fait un des plus rentables de la place.

Décennie glorieuse

Avec un flair certain, Jean-Michel Darrois a été l’un des premiers, avec Jean-François Prat – son éternel concurrent -, à comprendre que le marché des fusions-acquisitions allait formidablement doper le droit des affaires. L’avocat est un intuitif. « Jean-Michel est doté d’une imagination juridique débordante », note son ami Alain Minc. « Il a une sorte de sixième sens sur les dossiers et il est d’une discrétion absolue », confirme Stéphane Courbit, le patron de Banijay Group.

« L’époque était passionnante, le droit se construisait au fur et à mesure que nous y participions », se souvient Jean-Michel Darrois. En 1991, le cabinet participe à l’OPA du groupe Pinault sur le Printemps. L’inventivité juridique de Jean-Michel Darrois – et la combativité héritée de ses années de champion de boxe universitaire – et le talent de Philippe Villey dans cette opération seront à l’origine de la réglementation sur les offres obligatoires qui contraint les acquéreurs à lancer des offres sur l’ensemble du capital dès qu’ils dépassent la barre des 30%.

Cette décennie glorieuse verra l’OPA de Nestlé sur Perrier en 1992, celle d’Axa sur UAP en 1996, la spectaculaire victoire de TotalFina sur Elf en 1999 dans une des batailles les plus acharnées du capitalisme français. Le cabinet va encore conseiller Martin Bouygues face à Vincent Bolloré en 1998. Mais c’est aussi l’affaire des fausses factures de la Cogedim, en 1992, dans laquelle Jean-Michel Darrois défend le numéro 2. Ou celle du sang contaminé, où l’avocat obtient l’acquittement de son ami de toujours Laurent Fabius. « C’est mon ami depuis plus de cinquante ans et mon avocat pour les petites et les grandes choses », confie aujourd’hui le président du Conseil constitutionnel.

Esprit « start-up »

L’esprit innovant – aujourd’hui, on dit ‘start-up’ – continue d’opérer chez DVMB. Ici, pas de services support imposants, car ce sont les associés désignés qui assument les fonctions de gérance et de gestion, à tour de rôle. « Le sentiment d’appartenance est puissant et sans effort », constate Carine Dupeyron, associée en arbitrage. « Dans les cabinets américains, il est interdit de fermer les portes. Ici, je n’ai jamais vu autant de portes fermées mais il n’y a aucun frein », estime-t-elle. Sébastien Bazin, le patron du groupe Accor, note de son côté qu’« il y a à la fois une grande unicité du cabinet et une très grande indépendance. Une vraie culture sur les valeurs vérité-confiance qui dépasse largement le cadre du droit. Si une transaction ne présente pas un intérêt stratégique, ils vont vous le dire. »

Jean-Michel Darrois sait prendre la lumière. Trop, pour certains...
Jean-Michel Darrois sait prendre la lumière. Trop, pour certains…©Frédéric STUCIN pour les Echos Week-end.

Il y a un mystère de l’affectio societatis dans ce cabinet. « En fait, on fonctionne comme un kibboutz », s’amuse Cyril Bonan, associé depuis 2008. Le faible ratio associé/collaborateur oblige chacun à s’impliquer personnellement dans les dossiers. Il n’y a pas ici de « time sheet », ces feuilles récapitulatives qui permettent aux avocats de comptabiliser les heures passées sur une affaire. « Ils continuent à fonctionner à 80 comme ils le faisaient à 7 », constate un habitué du 69, avenue Victor Hugo. Tous les jeudis, les associés se retrouvent à déjeuner : « On parle de tout », raconte Cyril Bonan.

« Avocats » tout court

C’est un des secrets de la méthode Darrois : réunir autour de lui des gens différents tout en faisant mine de s’en plaindre. « Comment voulez-vous que le cabinet avance ? Avec Philippe [Villey] qui récite à nos clients des Pandectes [analyses, NDLR] de Demolombe [grand exégète du droit français au xixe siècle, NDLR], Alain [Maillot] qui pendant une réunion entre par la porte et aussitôt sort par la fenêtreMarie-Noëlle [Dompé] qui veut mettre en prison la terre entière et Emmanuel [Brochier] qui tel Philippulus prédit des catastrophes », avait-il coutume de dire en riant. « J’aime les personnalités un peu rares », glisse-t-il aujourd’hui.

Tous relèvent cependant un fort sentiment d’appartenance fondé sur des valeurs communes. Jean-Michel Darrois et ses troupes n’ont jamais voulu renier leur ADN d’avocat. Cyril Bonan a ainsi été soutenu par son mentor quand, jeune avocat d’affaires plus habitué aux « closings » qu’aux prétoires, il a décidé de passer la conférence du stage, ce prestigieux concours d’éloquence qui chaque année récompense de jeunes plaideurs.

D’ailleurs, cela énerve Jean-Michel Darrois que l’on définisse DVMB comme un « cabinet d’affaires ». « On est avocats. La défense est la même, que cela soit pour une personne physique ou une personne morale. Le client remet une part de sa vie entre vos mains. Il nous appartient d’honorer cette confiance », confie-t-il. « Pouvoir passer des heures sur une tête d’épingle, c’est un luxe que peu de cabinets offrent », constate Christophe Ingrain, ancien magistrat qui a rejoint le cabinet en 2010.

Un mirifique carnet d’adresses

Le double mixte avocat-droit des affaires participe de l’image de marque. « En droit pénal des affaires, notre défense prend en compte le business et les rapports dans lesquels l’entreprise évolue », détaille Christophe Ingrain. Jean-Michel Darrois n’a lâché sa robe qu’une seule fois. Au soir de la condamnation d’Alain Boublil, ancien directeur de cabinet du Premier ministre Pierre Bérégovoy, à plusieurs mois de prison, l’avocat furieux l’a jetée : « Elle s’est glissée sous le lit, je ne l’ai jamais retrouvée. J’en ai racheté une autre. »

« Jean-Michel a une vraie culture du métier d’avocat. Sa marque de fabrique, c’est la loyauté », insiste Hervé Temime. Le fameux pénaliste a failli s’associer avec Jean-Michel Darrois il y a une quinzaine d’années. La greffe n’a pas pris mais ils sont restés amis. « En fait, mon ambition ultime c’est de devenir le Darrois du pénal », glisse en souriant l’avocat qui a dernièrement obtenu la relaxe de Bernard Tapie.

Succès après succès, tout en participant à la construction des empires de François Pinault et de Martin Bouygues, Jean-Michel Darrois s’est forgé une arme atomique : un mirifique carnet d’adresses. Certains de ses clients continuent de prendre conseil depuis des années, voire sont devenus des amis. « J’ai connu Jean-Michel Darrois en 1985. Je ne l’ai plus jamais quitté », raconte Sébastien Bazin.

Martin Bouygues assure qu’« il n’y a pas une semaine sans que l’on se parle ou que l’on se rencontre. C’est quelqu’un de très réfléchi. Il sait me tempérer, me rassurer, un peu comme un médecin de famille. Je n’ai pas besoin de me poser la question de savoir s’il est là ou pas. Je sais qu’il est là. » Malheur en revanche à ceux qui un jour vont voir ailleurs : « Si vous travaillez avec lui, ne me rappelez jamais », aurait-il ainsi lancé à un patron qui avait l’outrecuidance de chercher une seconde opinion.

Pertes et fracas

Jean-Michel Darrois sait prend la lumière . Pour preuve, en 2008, Nicolas Sarkozy lui confie la présidence de la Commission sur la grande profession du droit ; l’année suivante, on parle de lui pour un siège au Conseil constitutionnel. Mais une telle envergure peut devenir un problème, comme en témoigne la crise de croissance douloureuse du cabinet, de 2012 à 2015.

Au début des années 2000, Jean-Michel Darrois avait choisi de faire monter une nouvelle génération d’avocats. Hervé Pisani et Olivier Diaz, stars montantes du M & A, deviennent les symboles de cette relève. Mais ces deux-là quitteront le cabinet avec pertes et fracas en 2012 . L’année suivante, c’est une équipe entière qui choisit de voler de ses propres ailes. Les défections s’enchaînent. « Ca ne collait pas. Ils n’avaient pas compris la culture profonde de cette maison », se souvient Cyril Bonan.

Un autre observateur résume la crise de manière plus prosaïque : « Certains ont cru qu’ils allaient pouvoir s’installer dans les bottes de Darrois, profiter de son carnet d’adresses et le remplacer. Ils ont perdu. » « À l’ombre des grands arbres, rien ne pousse », entend-on dans le petit milieu des avocats d’affaires.

Ambition individuelle et collective

Finalement, les départs seront salutaires, comme une chirurgie interne nécessaire pour le cabinet et son fondateur, perpétuel angoissé hypocondriaque. « L’atmosphère qui s’était noircie est redevenue saine. Je ne veux pas partir tout de suite, mais je ne veux pas non plus mourir en plaidant et je veux que le cabinet continue », dit-il aujourd’hui. Pas si simple. Sauf à imposer une marque qui lui survive – mais l’avocat est un des derniers à pouvoir tutoyer les grands patrons, les politiques et les people et les défendre ensuite.

« Dans les grandes structures internationales, la marque préexiste au cabinet alors qu’ici c’est le cabinet qui a créé la marque », constate Marcus Billam, qui a commencé sa carrière d’avocat M & A chez DVMB avant de partir dans un grand cabinet anglo-saxon, puis de finalement revenir quelques années plus tard. « Jean-Michel avait le premier beaucoup d’ambition pour lui et ça s’est étendu au cabinet : ils sont passés d’une ambition individuelle à une ambition collective », remarque un habitué du 69, avenue Victor Hugo.

Aujourd’hui, Jean-Michel Darrois, éternel mélancolique, donne l’impression de s’ennuyer – un peu comme un enfant qui aurait fait le tour de son coffre à jouets. Marié à la photographe Bettina Rheims, il dit depuis vingt ans qu’il en a assez, assure qu’il ne veut « pas faire le combat de trop », mais il est toujours là, très présent. « Il ne peut pas résister à la très belle affaire ou la belle opération. C’est à cet instant, quand il sent qu’il peut être utile ou indispensable, que les yeux brillent, qu’il réunit ses troupes… », raconte un proche.

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En plus du développement du site, Mamun me fait régulièrement des travaux d’infographie pour égayer les articles-blog. J’ai du les baisser ces derniers mois pour faire des économies. Coût : développement 30€, infographie 30€, total 60€.

Xenforo le moteur du forum : 60€ le renouvellement annuel.

Ensuite les abonnements des articles que vous pouvez lire en sus des miens :

  • Le Monde
  • Les Echos
  • Challenges
  • Le Figaro
  • Capital
  • Mediapart
  • L’Obs
  • Marianne
  • L’Express
  • L’informé…

En moyenne 10€ par mois et par revue. Certaines plus, certaines moins, mais en moyenne 10€

En résumé :

  • Domaine : 27€ par mois
  • Hébergement : 49€ par mois
  • Xenforo : 160€ = 14€/mois
  • Mamun : 30€ maintenance & améliorations ; infographie 30€.
  • Abonnements : 100€

Total : 250€ / mois = 3000€/an

Huile de coude Map : 0€ pour l’instant.

Merci chaleureusement à tous les membres qui ont déjà participé à la cagnotte pour les frais de mi-2023 à mi-2024, mais cela n’a couvert que la moitié des frais sont compter les frais du S2 2024. Je mets donc 150€ par mois de ma poche pour faire fonctionner le blog. Je ne pourrai pas continuer sans un petit effort supplémentaire de votre part.

Je n’exclus pas dans le futur un petit paiement à l’article blog, style 0.99€ ou 1.99€ selon la longueur de l’article, mais pour l’instant, j’insiste sur le fait que la présente cagnotte est seulement une participation aux frais techniques et en aucun cas une rémunération de mon travail. Ceux qui auront participé à hauteur d’au moins 20€ seront exclus de frais de lecture durant 6 mois, si le blog passait au paiement à l’article (pour les seuls articles avec Copyrights blog bien entendu et nous devrons arrêter de relayer les articles de la presse).

Donc même si c’est le genre de démarche jamais très agréable à faire, je vous propose une participation de votre choix aux frais du Blog & Forum, et 10% ira à titre de bonus à Mamun qui travaille souvent jusqu’à minuit pour finir des tâches urgentes pour le blog.

Pour la tirelire, j’utilise le site de cagnotte potcommun.fr entièrement sécurisé et qui vous permet de payer anonymement si vous le souhaitez.

https://www.lepotcommun.fr/pot/zabu12tp