Deux nouveaux concurrents rôdent autour de la société de services informatiques qui accumule les déboires. Cap Gemini et Orange surveillent aussi Atos depuis plusieurs mois.
C’est une mauvaise nouvelle de plus pour Atos. Ce lundi, le groupe de services informatiques vit son premier jour hors du CAC 40 après une année de déboires en série. Rentabilité en chute libre (-30%), cours de bourse qui dégringole (-40%), doutes sur la sincérité des comptes de sa filiale américaine et une gouvernance critiquée… Des difficultés qui réveillent l’appétit de ses rivaux.
« Nos déconvenues suscitent de l’intérêt », reconnaît un cadre d’Atos.
Selon plusieurs sources, deux nouveaux concurrents observent de près Atos. Le premier est Thales qui « regarde la situation d’Atos mais ne l’a pas approché, explique un proche du spécialiste de l’électronique. Thales n’est intéressé que par la division cybersécurité mais Atos n’est pas prêt à la vendre ». Cette division permettrait au groupe dirigé par Patrice Caine de se renforcer dans ces métiers et dans la défense, le cœur historique de Thales. Les deux groupes sont de plus en plus concurrents depuis qu’ils ont bataillé en 2017 pour le rachat de Gemalto, finalement raflé par Thales. Le groupe n’a pas souhaité commenter.
Sopra et Atos s’observent depuis longtemps
Un autre concurrent regarde attentivement Atos: le spécialiste des services informatiques Sopra Steria. Mercredi dernier, le président du groupe Pierre Pasquier a évoqué le sujet Atos devant les représentants des salariés. « Il regarde le dossier car il est toujours à l’affût de croissance externe, explique un des élus. Mais il a reconnu qu’Atos était gros ». Sopra Steria vaut 3,5 milliards d’euros en Bourse contre 5 milliards pour Atos. Contacté, le groupe ne nous a pas répondu. De son côté, Atos n’a pas souhaité commenter.
Comme face à Thales, Atos avait aussi bataillé et perdu contre Sopra en 2014 pour racheter Steria. « Les deux groupes se sont toujours regardés l’un l’autre », explique un bon connaisseur des deux entreprises. « Ce schéma ferait du sens sur l’ensemble des activités, confie un proche d’Atos. Et il y aurait des synergies à dégager ». Un cadre d’Atos tempère: « on est trop gros pour Sopra, c’est plutôt nous qui pourrions les racheter ». Une fusion entre égaux permettrait de régler les sujets de financements, lourds pour les deux entreprises, et de stabilité du capital. Atos manque d’actionnaires de référence quand celui de Sopra Steria, la famille Pasquier, « ne veut pas vendre », assure cet élu. On n’en est pas là mais l’option de Sopra Steria est la seule, pour le moment, qui permettrait à Atos de maintenir son intégrité.
L’Etat surveille de près
Deux autres industriels, eux aussi, sont en alerte depuis plusieurs mois. A commencer par le rival de toujours Cap Gemini. « Cap regarde Atos avec beaucoup d’étonnement, explique une source proche du groupe. Un groupe de ce niveau ne devrait pas avoir ce genre de problème ». C’est surtout l’activité de gestion des données (« big data ») et cybersécurité qui fait saliver tous les concurrents. Elle ne génère que 15% du chiffre d’affaires mais pèse l’essentiel de la valeur d’Atos en Bourse. Surtout, ses contrats avec l’armée française, hérités de l’ancien Bull, en font un actif hautement stratégique et surveillé par l’Etat.
Les marchés spéculent par ailleurs sur un intérêt d’Orange qui pourrait marier sa branche de cybersécurité (OBS) avec celle d’Atos. « Nouer un partenariat dans ces métiers pourquoi pas mais pas au-delà », nous expliquait récemment un dirigeant d’Orange, balayant l’idée d’un mariage global entre les deux groupes.
Face à la multitude de prédateurs, Atos résiste et refuse catégoriquement de vendre sa pépite. « Le groupe ne veut pas se découper » assure un proche. Son patron Elie Girard, très critiqué par les investisseurs et en interne, fait le dos rond. Les concurrents n’hésitent pas à réclamer un changement de direction pour jouer leur va-tout.