ENQUÊTE. Au pied du mur, le fleuron français Atos va céder ses activités de conseil à Daniel Kretinsky tout en lui ouvrant 7,5% du capital de la filiale stratégique Eviden. De l’Elysée aux cabinets de conseil en passant par le réseau de polytechnique, voici comment les propositions françaises et européennes de reprises ont été éconduites, profitant au milliardaire tchèque.
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Dans les couloirs du ministère des Armées, un drôle de nom de code circule : « Dixmude ». Sous couvert de discrétion, il s’agit de nommer un dossier ultrasensible qui agite le monde économique, militaire et politique depuis plus de deux ans : l’avenir du géant français Atos, confronté à une tempête boursière et à des errances stratégiques récurrentes. Ce nom de code fait référence à une bataille décisive de la première guerre mondiale. Fin 1917, à Dixmude, une ville belge proche de la frontière française, des fusiliers marins inexpérimentés étaient venus prêter main forte à l’armée de terre tricolore pour repousser 40.000 Allemands.
Un choix d’appellation qui dit à quel point le dossier Atos est stratégique. Il met en jeu des intérêts français sensibles alors que l’ombre plane sur le rachat du groupe exsangue par un investisseur étranger. Le fleuron devient une proie encore plus ciblée depuis l’annonce en juin 2022 de la scission du groupe voulue pour son président Bertrand Meunier. Celle-ci prévoit la vente des métiers de conseil et infogérance, regroupés dans Tech Foundation et la mise en Bourse d’Evidian (désormais Eviden), qui rassemble les activités très rentables et en forte croissance de cybersécurité, cloud, big data, IA et supercalculateur.
Dos au mur, Atos dégaine un plan de scission
Le 1er août, l’offre de Daniel Kretinsky est acceptée par Atos. Le magnat tchèque est désormais en position de mettre la main sur Tech Foundations. Et avec 7,5% du capital d’Eviden, il entrerait au conseil d’administration, qui chapeaute les activités cybersécurité, supercalculateur et IA.
Pourtant, dès début 2022, l’Institut des hautes études de défense nationale, dirigé par le général Benoit Durieux, faisait part des inquiétudes des militaires au ministre Sébastien Lecornu. Le groupe sécurise notamment les communications pour l’armée et les services de renseignement. « Atos a acquis un savoir-faire quasi-unique dans la simulation numérique des essais nucléaires qui en fait effectivement une source stratégique de la souveraineté française et européenne », assure une source du ministère des Armées. La branche cyber sécurité – qui abrite l’ancienne société Bull – comprend aussi des actifs sensibles particulièrement importants pour les services de renseignement français.
L’arrivée du chevalier blanc Daniel Kretinsky, nouveau sauveur du capitalisme français après les acquisitions d’Editis et de Casino, était-elle inévitable ? De l’Elysée aux cabinets de conseil en passant par le réseau de l’école polytechnique, l’enquête de Challenges retrace les luttes d’influence autour de ce dossier et les dessous de l’évincement d’offres françaises et européennes. Si un prochain conseil d’administration doit encore validée officiellement l’offre du Tchèque, l’affaire pourrait bien connaître encore des rebondissements.
Atos éconduit les approches européennes
C’est en septembre 2022 que le français One Point ouvre les hostilités en proposant 4,2 milliards pour racheter le groupe aux 110.000 salariés. Mais l’intérêt du rival d’Atos, 30 fois plus petit, est rapidement éconduit. Déjà, Bertrand Meunier, président du conseil d’administration, aurait refusé de recevoir le candidat au rachat, David Layani. L’affaire prend une autre tournure en janvier 2023. Airbus entre en discussion en vue d’une prise de participation de 29,9% dans Eviden (ex-Evidian). Trois mois plus tard, l’avionneur franco-allemand jette l’éponge invoquant des conditions financières non remplies. Une opération aussi compromise par le véto du ministère des Armées. L’Hôtel de Brienne n’a aucune confiance dans l’avionneur européen jugé « trop proche des Allemands ». Même si à ce jour, selon nos informations, Airbus n’aurait pas tout à fait renoncé.
Un consortium français s’invite alors dans la danse, comme le relève le JDD en janvier 2023. Le groupe Astek, une SSII dirigée par Julien Gavaldon, fait part de son intérêt et veut avoir accès au dossier. Au sein de cette entreprise aux 500 millions d’euros de chiffre d’affaires et aux 7.200 salariés, un groupe de « patriotes » pilote en interne la candidature. Il est accompagné par Chapsvision. Cet éditeur de logiciels de données est souvent présenté comme le Palantir français, en référence à la société américaine spécialiste du big data qui travaille pour de nombreux services de renseignements et notamment en France pour la DGSI.
L’initiative est largement soutenue par les petits actionnaires. Ils aspirent à présenter une offre alternative à celle de Kretinsky, qui commence alors à sortir du bois. Car l’offre d’Astek n’est également pas prise au sérieux par l’actuelle direction. Le groupe, qui récuse toute prise de contact officielle, dénonce alors une opération de déstabilisation.
Pour l’Elysée, il n’y a pas urgence
Avant de lancer cette initiative, les dirigeants d’Astek rencontrent pourtant les acteurs politiques, industriels et stratégiques susceptibles de jouer un rôle dans cette cession. Le ministère des Armées qui les reçoit s’intéresse au projet, même si le ministre Sébastien Lecornu assure qu’il ne peut pas s’exprimer publiquement sur ce dossier, ni défendre une cause. Ils rencontrent également des responsables de la DGA et assurent que beaucoup de militaires, qui ne peuvent s’exprimer, soutiennent leur démarche.
A l’Elysée, le secrétaire général de la présidence, Alexis Kohler, offre aussi une entrevue. La Lettre A révélait en avril 2023 l’existence d’un courrier envoyé par les responsables d’Astek et de Chapsvision au secrétaire général dans lequel ils détaillent leur souhait de « sanctuariser les activités particulièrement sensibles au sein d’une structure à actionnariat verrouillé ». L’homme de l’ombre du président Macron tranche : « il n’y a pas d’urgence » en ce qui concerne le dossier Atos.
Les réseaux de l’école Polytechnique s’activent également. Les membres de la direction d’Astek en sont presque tous issus. A l’instar de certains dirigeants des fonds d’investissements qui les accompagnent dans le montage financier notamment Marwan Lahoud (Tikehau Capital) et président du conseil d’administration de l’AX, l’influente association des anciens de l’école d’ingénieur. Du côté d’Atos, Bertrand Meunier est lui-même un ancien de polytechnique, ainsi que son vice-président Bruno Milard.
Atos, un juteux marché pour les cabinets de conseils
Reste qu’Astek doit élargir son influence. Les cabinets de conseil sont, banques d’affaire et personnalités qui gravitent autour d’Atos sont sondés. La liste est longue. On trouve Rotschild & Co avec Grégoire Chertok, Lazard, Mc Kinsey, David Azema, un banquier d’affaires qui travaille pour Perella Weinberg et fin connaisseur des arcanes de Bercy. Il a notamment travaillé sur l’entrée – avortée – d’Airbus au capital d’Atos; l’agence de communication image 7, dirigée par Anne Méaux, qui conseille Bertrand Meunier et collabore avec le banquier David Azema…
Alain Minc est aussi sollicité. L’influent essayiste conseille personnellement Bertrand Meunier. Et relaye les positions de ce dernier, qui ne veut pas entendre parler de leur proposition. Des menaces de déstabilisation sont évoquées s’ils ne renoncent pas à leur projet. Alain Minc nie cette rencontre : « Je ne les ai pas reçus car c’est la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf. »
A l’image de l’intervention présumée du célèbre visiteur du soir, les sollicitations par Astek du Tout-Paris aiguisent l’appétit des cabinets de conseils. Et se retrouvent confrontées à celle d’Atos. Car le géant français multiplie, sur demande de Bertrand Meunier, les recours à ces prestataires. Résultat : les coûts de la scission s’élèveraient à près de 400 millions d’euros, dont une partie très significative versée aux conseils de Meunier, estiment plusieurs sources du dossier. Ainsi, le magnat tchèque apparaît aux yeux de nombreux acteurs comme le repreneur le plus bankable.
Kretinsky, un repreneur bankable
« Comme le plan de réforme du patron d’Atos est incompréhensible, il a mobilisé tous les cabinets influents de la place de Paris pour les neutraliser. Résultat : tous sont devenus de grands défenseurs du projet Kretinsky parce qu’ils pensent que si cela aboutit il y aura au minimum une centaine de millions à se partager. C’est leur seul critère pour l’appréciation d’un dossier, la protection de la souveraineté de la France ne les intéresse pas », analyse un responsable d’Astek.
Le recours à ces prestataires est une routine chez Atos. En 2022, le groupe fait partie du top 10 des plus gros acheteurs de conseil en France, selon le site freelance.com. Thierry Breton, l’ancien patron, passait deux jours par mois avec le cabinet McKinsey pour plancher sur la refonte de l’architecture de l’entreprise. Rodolphe Belmer, lui-même ancien de McKinsey sollicitera aussi ces services de consulting lors de son intérim de 6 mois à la tête du groupe. Un travail qui débouchera sur le projet de scission.
Les syndicats et les petits actionnaires dénoncent l’influence de ces conseils qui flirteraient avec les conflits d’intérêts. La banque Rotschild & Co joue un rôle important de conseiller financier chez Atos et a aussi travaillé avec Kretinsky sur son offre de rachat de Tech Foundations. Une démarche tout à fait normal estime l’entreprise. Ce projet d’envergure nécessite des conseils extérieurs sur les points juridiques, financiers, stratégiques ou organisationnels, fait savoir le groupe.
Au delà de ce mélange des genres, de nombreux acteurs du dossier s’interrogent sur le bien fondé stratégique de cette reprise par Kretinsky. Le manque d’expérience de l’industriel dans ce secteur a d’abord inquiété les marchés. Peu importe, l’intéressé privilégie depuis longtemps les investissements à contre-cycle et les secteurs « en panne » dans le but de relancer la machine.
Colère des petits actionnaires d’Atos
C’est plutôt le timing et le montage qui laisse songeur les petits actionnaires. « C’est un non-sens industriel. Le groupe avait lancé un plan de restructuration de Tech Foundations plutôt efficace qui prévoyait 1,2 milliard d’investissement et sa restructuration jusqu’en 2025. Pour finalement, la vendre à Kretinsky ! Sans compter que Tech Foundations dépend des technologies d’Eviden », commente un observateur avisé du secteur.
Un autre actionnaire détaille davantage : « L’offre de Kretinsky est spoliatrice et impose à l’entreprise de brader ses actifs. Le projet de reprise ne concerne même pas la dette d’Atos. C’est désormais le comportement d’un homme ivre et d’un CA inféodé dont les membres ne veulent pas perdre leurs 90 000 euros de jetons de présence et ferment les yeux » confie un investisseur qui travaille à la création de l’Union des actionnaires d’Atos en colère( Udaac).
L’association en gestation ne compte pas en rester là. « Nous n’avons absolument pas été informés ni consultés à propos des négociations avec Kretinsky. Nous envisageons des recours juridiques qui cibleraient la communication financière du groupe et l’absence d’informations », confie Hervé Lecesne, qui détient 1% du capital et devrait prendre la présidence de l’Udaac.
Atos rappelle que le marché envisageait une cession de Tech Foundations à une valeur négative et que le périmètre d’activité de Tech Foundations ne comprend pas de contrats dits « sensibles », c’est-à-dire susceptibles de soulever des questions de souveraineté nationale
Le ministère de l’Economie et de la souveraineté nationale, qui suit le dossier, pourrait bien trancher l’affaire. En cas de cession de Tech Fondation, Bercy assure à Challenges qu’il y aura une procédure de contrôles d’investissements étrangers. Un dispositif qui ne s’appliquerait toutefois pas à la partie Eviden. Avec 7,5% du capital, la prise de participation est en dessous de 10%, le seuil légal pour déclencher un contrôle des services de l’Etat.
Une commission d’enquête ?
En attendant, un porte-parole du groupe de Krestinky tente de déminer le terrain. « Nous n’accroîtrons pas notre part (dans Eviden) au-delà du seuil annoncé et nous ne jouerons aucun rôle actif de quelque nature que ce soit et moins encore exercerons de contrôle. Nous entendons respecter absolument la souveraineté nationale en cette matière. »
Des propos tenus après la publication d’une tribune d’une trentaine de parlementaires s’inquiétant de cette opération. Son instigateur, le sénateur LR Cédric Perrin pointe la responsabilité de l’Elysée. « Kretinsky est en train de racheter la France par appartements avec la bénédiction du clan Macron et Kohler qui ont joué un rôle actif dans ce dossier. Or il y a urgence pour sauver le soldat Atos ». Un dossier devenu tellement politique que certains n’hésitent pas à réclamer la création d’une commission d’enquête parlementaire.
https://www.challenges.fr/entreprise/atos-comment-le-made-in-france-sest-fait-coiffer-sur-le-poteau-par-kretinsky_864024
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SI VOUS ESTIMEZ L’ATTITUDE DE LA GOURVERNANCE D’ATOS N’EST PLUS TOLÉRABLE, A SAVOIR UNE DESTRUCTION A PETIT FEU DES CAPITAUX PROPRES D’ATOS,
REJOIGNEZ l’association UDAAC, L’union des actionnaires d’Atos en colère et inscrivez vous sur l’agrégateur d’actions pour recenser les promesses d’adhésions.
Nous proposons aux actionnaires révoltés par l’action de cette gouvernance, de participer à la création de l’association « loi 1901 » : l’UDAAC [Union des Actionnaires d’Atos en Colère], afin de mandater un cabinet d’avocat spécialisé dans la défense d’actionnaires pour dénoncer la désinformation d’Atos auprès de l’AMF et l’inscription de résolutions afin de destituer Bertrand Meunier et au moins la moitié du board à l’AGE de novembre et bien-entendu, annuler l’AK, les cessions d’actifs bradés et d’annuler le chèque de 1Md€ à Daniel Kretinsky.
Pour cela il nous faut réunir des fonds pour financer ce combat, car l’argent est le nerf de la guerre.
Je propose une participation de 5 cts par action détenue, montants qui seront gérés scrupuleusement par le bureau de L’UDAAC une fois l’association immatriculée en préfecture et les sommes non-utilisées seraient reversées aux membres.
Toutes les candidatures pour le bureau de l’UDAAC sont bienvenues.
Union Des Actionnaires d’Atos en Colère
Association 1901 en cours de création
Je rappele que pour toutes questions, un forum spécifique a été créé: forum.bourse.blog/udaac/
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