ATOS : Airbus renonce à prendre une part minoritaire d’Evidian, le groupe informatique chute en Bourse (LES ECHOS)

Le groupe aéronautique européen dit renoncer à entrer à hauteur de 29,9 % au capital d’Evidian, la future entité cyber et cloud d’Atos. L’action du groupe informatique français a plongé de 17 % ce mercredi en Bourse.

Par Leïla MarchandAnne DrifAnne Bauer

Publié le 29 mars 2023 à 12:43 Mis à jour le 29 mars 2023 à 18:44
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Coup dur pour Atos​. Le groupe informatique français vient de voir s’envoler son meilleur scénario pour Evidian​, sa future entité cyber et Big Data. Le groupe aéronautique européen Airbus​, avec qui il était en discussion dans le cadre de son projet de scission, a annoncé, ce mercredi, renoncer à prendre une participation de près de 30 % dans la société.

« Airbus est arrivé à la conclusion que l’acquisition potentielle d’une part minoritaire de 29,9 % d’Evidian ne correspond pas aux objectifs de l’entreprise », a indiqué un porte-parole de l’avionneur. Ce revirement complique le schéma souhaité par Atos pour sa restructuration. Des discussions avaient été engagées en janvier avec le groupe aéronautique sur la base d’une « offre indicative ». Elles étaient qualifiées à l’époque de « prometteuses ».

L’opération aurait fait d’Airbus le principal partenaire industriel d’Evidian et lui aurait donné un droit de regard sur la nouvelle entité, qui doit regrouper les actifs les plus convoités d’Atos tels que la division cybersécurité BDS ou les supercalculateurs.

Mais lors du conseil d’Airbus, qui s’est tenu mardi 28 mars, le projet a suscité des débats plus vifs que prévu parmi les administrateurs. L’opération défendue par le président d’Airbus, Guillaume Faury, et ses directeurs était pilonnée depuis un mois par le fonds alternatif TCI, qui dénonce dans ce projet « une opération de sauvetage forcée » par l’Etat français d’un groupe en perdition. Le hedge fund TCI est un actionnaire significatif avec un portefeuille de plus de 3 % du capital Airbus.

Dans l’entourage d’Airbus, on souligne que le recul annoncé n’est pas une réponse à TCI, mais que le groupe a estimé le prix surévalué au vu des premières analyses. « Le point qui s’est révélé bloquant, c’est le seuil de 29,9 %, le prix n’a même pas été évoqué », affirment d’autres sources. D’ailleurs, le groupe n’aurait même pas eu le temps d’achever les due diligences. Une valeur de 4 milliards d’euros était évoquée pour Evidian, ce qui aurait amené Airbus à signer un chèque de 1,2 milliard d’euros.

Risque à l’assemblée générale d’Airbus

« Le changement de perspective est intervenu après l’opposition de TCI », expliquent plusieurs proches du dossier. « Airbus a préféré anticiper en vue de son assemblée générale du 19 avril, au cours de laquelle TCI entendait soulever des questions clés sur l’intervention publique derrière cette opération », indique une source.

Airbus nie toute intervention publique et défend un projet « industriel » – son porte-parole assurant que les discussions avec Atos allaient se poursuivre pour nouer un partenariat de long terme avec Evidian sur la base d’un autre schéma, y compris capitalistique. L’option Airbus n’est donc pas complètement écartée. « La balle est dans le camp d’Airbus aujourd’hui, de nombreuses options sont possibles », indiquent des proches du dossier.

A ce stade, Atos n’a ouvert la porte qu’à une participation en dessous de 30 %. « Atos prend acte de la décision d’Airbus », a réagi laconiquement la société dans un communiqué. A la Bourse de Paris, l’action Atos chutait d’environ 17 %, à 10,71 euros, accusant la plus forte baisse du SBF 120.

Atos écarterait en tout cas aujourd’hui une vente pure et simple d’Evidian contre un chèque de sortie. « Le travail de restructuration porte ses fruits, Atos est encore plus convaincu qu’il y a un an que de la valeur supplémentaire peut être créée pour ses investisseurs, sinon ils auraient déjà vendu », souligne un connaisseur du dossier. Des mécanismes de participation aux bénéfices futurs sont possibles.

Relance des alternatives

Le groupe informatique se donne du temps, jusqu’à la fin du second semestre, pour faire aboutir sa restructuration. D’ici à ce qu’Airbus revoie sa copie, des négociations peuvent aussi s’ouvrir avec d’autres entreprises. « Les discussions avec Airbus n’ont jamais été exclusives. Le projet de faire entrer un actionnaire de référence est toujours ouvert », indique une source.

Pour rappel, Atos comptait sur cette opération pour financer la restructuration de sa branche infogérance TFCo (gestion des serveurs informatiques des entreprises), en perte de vitesse, pour lequel le groupe a besoin d’au moins 1,6 milliard d’euros. C’est pourquoi il s’était résolu à une scission, mettant ses activités de croissance dans une nouvelle société, Evidian, et à l’introduire en Bourse.

Outre Airbus, qui était en pole position, Thales, Orange ou encore Onepoint pourraient être intéressés par tout ou partie des activités d’Evidian. L’homme d’affaires tchèque Daniel Kretinsky s’est, lui, positionné sur la partie infogérance d’Atos. Onepoint, qui pourrait envisager une offre avec un autre partenaire industriel, a fait savoir qu’il était prêt à étudier « toutes les possibilités de rapprochement, dans le cadre d’une acquisition d’Evidian, pour apporter une solution française pérenne et ainsi satisfaire toutes les parties prenantes ». Chez Thales, on déclare que le dossier est refermé depuis longtemps.

Leïla Marchand, Anne Drif, Gwenaelle Barzic, A.B.

https://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/airbus-renonce-a-la-branche-cyber-datos-le-groupe-informatique-chute-en-bourse-1920227

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