Le groupe va se scinder en deux entreprises autonomes avec, d’un côté, les activités en croissance dans le cloud et la cybersécurité et, de l’autre, les métiers historiques en déclin dans l’infogérance. Arrivé début janvier, le directeur général, Rodolphe Belmer, démissionne avec un parachute doré.
Il était arrivé, en urgence, en janvier, pour tenter de rétablir un groupe en perte de sens. Moins de six mois plus tard, Rodolphe Belmer jette l’éponge. Atos a annoncé, mardi 14 juin au matin, la démission de son directeur général. A l’origine de ce départ brutal : la décision du groupe d’informatique de se scinder en deux entités distinctes, toutes les deux cotées en Bourse, avec, d’un côté, les activités en croissance dans le cloud et la cybersécurité et, de l’autre, les métiers historiques en déclin dans l’infogérance.
S’il dit ne pas vouloir critiquer « la décision souveraine du conseil d’administration » d’Atos auquel il appartenait, Rodolphe Belmer tire, avec sa démission, les conséquences de ce choix radical. La séparation du groupe rend « ma position de directeur général superflue », a-t-il reconnu lors d’une conférence de presse. Il restera en poste jusqu’au 30 septembre, le temps de passer la main aux futurs directeurs généraux des deux futures entités : Philippe Oliva pour la partie digitale, baptisée Evidian ; Nourdine Bihmane pour les activités historiques, appelées Tech Foundations. Cette organisation doit permettre « d’éviter les luttes intestines », espère M. Belmer.
Souverain et stratégique
Une fois séparées, les deux entités pourraient plus facilement intéresser des repreneurs, surtout Evidian. Plusieurs groupes, comme Thales, Orange ou Airbus tournent déjà depuis plusieurs mois autour des activités cloud et cyber d’Atos. Compte tenu du caractère souverain et stratégique de ces activités, l’Etat veillera à ce qu’elles restent entre les mains d’actionnaires français. Les métiers en déclin pourraient, eux, intéresser des spécialistes de la réorganisation de ce type d’activités, notamment des fonds d’investissement.
Malgré un contexte porteur, le chiffre d’affaires d’Atos baisse sans discontinuer depuis deux ans
La scission s’apparente à un démantèlement d’Atos, dans la forme construite par l’ancien PDG emblématique du groupe, Thierry Breton, parti en novembre 2019 à la Commission européenne. La future entité Evidian regroupe une grande partie des activités héritées du rachat de Bull en 2014. La greffe avec les métiers historiques n’a jamais réellement pris. Même si des ventes de prestations croisées entre les deux activités existent, les bénéfices dans le digital ou le cyber servaient surtout à compenser la consommation de cash des autres activités. Malgré un contexte porteur, le chiffre d’affaires d’Atos baisse sans discontinuer depuis deux ans. En 2021, sa chute a atteint 4,3 % et les ventes se sont encore effritées de 2,4 % au premier trimestre 2022. En trois ans, Atos a perdu les trois quarts de sa valeur en Bourse et ne vaut plus que 2,1 milliards d’euros.
Des salariés « résignés »
La séparation des équipes entre les verts (Evidian) et les bleus (Tech Foundations) risque de créer un choc supplémentaire. Les salariés sont « inquiets voire résignés », reconnaissait lundi, avant ces annonces, Emmanuel Kilgus, coordinateur CGT chez Atos France. « Ils sont aussi fâchés », insistait le représentant syndical alors que les négociations annuelles sur les augmentations de salaires ont fini sur un échec. La direction proposait des augmentations individuelles, pour une hausse moyenne de 4 %, mais, contrairement à la demande des syndicats, aucune augmentation générale n’était prévue pour cette année, y compris pour les plus bas salaires.