Echange épistolaire avec un salarié Atos à propos des départs [Enveloppes bleues]

.

Je voulais faire un article de synthèse d’emails de salariés reçus après mon article sur les talents gâchés d’Atos, et puis comme mon style de français n’est pas la meilleure de mes qualités, j’ai décidé de vous les livrer 3 échanges épistolaires dans leur intégralité. En effet, si j’utilise parfois l’expression « selon une source interne », j’avais envie de laisser pour une fois, la parole pleine et entière à l’une de ces sources, en l’occurrence un salarié Atos.

===

Mardi 20 mai.

Salut Marc,

Tu t’intéresses aux départs  ?
Gare au burn-out

Les « talents » façon Atos c’est un coup de projecteur, c’est bon pour l’égo, temporaire, pas grand chose derrière (il ne faudrait pas dépenser de l’argent aussi !).

Les forces vives (3 à 10 ans d’expérience) sont parties il y a déjà quelques années, dans l’anonymat.

Tiens, Adil Tahiri est parti chez Konecta (tu chercheras son profil).
C’est officiel sur son LinkedIn.

Un autre (Ricky El-Quasem) a le sens de l’humour (sur son Linkedin). C’est le genre du bonhomme. LIRE ARTICLE BLOG

Même mouvance pour les 2.

Et Adil ne sera pas seul, mais les profils LinkedIn ne sont pas encore actualisés…

IA va signifier « Indian Army » d’ici peu. Un poil de R&D là où c’est le moins cher.

En toute honnêteté, on récupère encore quelques déçus d’autres ESN. C’est classique.

J’ai des doutes sur un plan social en France (l’inter-contrat n’est pas un motif légal de licenciement.)
L’attrition naturelle et les départs en retraite devraient dégonfler les effectifs pour moins cher.
Accélérés par une politique de placement en clientèle plus musclée où les électriciens sont envoyés faire de la plomberie et tenus pour incompétents s’ils n’y arrivent pas.

Et pour l’instant, Genesis ne brille pas par son originalité.

A suivre

============

Mercredi 21 mai.

Atos est rincée de plans d’économie dirigés sur les mauvaises cibles.
Dans « Cost killer » tu peux supprimer « cost » s’il n’a que ça comme stratégie.

Une des seules actions concrètes vues, toute récente : tailler dans les effectifs de ce qui est peut-être le plus gros projet d’Atos (le dossier médical partagé -DMP- de la CNAM, pris à Worldline).

467 Millions partagés avec Octo (Accenture).
C’est public : https://www.ticsante.com/story?ID=7308

F. Chartier suit le projet de près (bcp de sujets chauds dessus, sa tête doit en dépendre).

Il y a du gras sur le projet du DMP de la CNAM, c’est clair, mais ça a aussi tapé sur du muscle.
C’est tombé sans prévenir. On peut faire plus chirurgical quand on ne veut pas déstabiliser des équipes et payer les pots cassés ensuite (les pénalités sont considérables quand il y a une panne).
On peut craindre un big crunch si ça préfigure la suite.
Et la marge ne bougera dans le bon sens que si les personnes libérées trouvent une autre activité.

Le (très peu) de R&D semble partir pour l’Inde (c’est moins cher), fléché par Narendra Naidu (Data & AI). Y compris sur des sujets poussés par le marketing. Ceux qui se font déposséder … s’interrogent.

Il y a une pression naïve et maladroite à trouver de l’activité aux « intercontrats » (et faire partir les sous-traitants dont les profils matchent rarement).
Trop tôt pour dire les conséquences, possible mix de casse sociale et économique, savoir si on y va façon khmer rouge ou si c’est plus construit.

Là aussi, des échos radars en approche mais sans savoir où ils vont. Semaine prochaine, début du show Genesis. On aura la température.

Donc franchement, je n’ai pas d’avis sur Salle car on n’a presque rien vu de concret sur le terrain depuis son arrivée.
Pas de même de présence « médiatique » interne, rien pour galvaniser les troupes.
Silence radio.
C’est même étonnant d’avoir laissé la boite continuer sur son inertie tout ce temps.
Son action semble d’avoir allégé les effectifs partout où c’est possible. Silencieusement. Pour ne pas effrayer ? Il avance masqué ?

Bon point si sa discrétion est de la modestie (comme un doute  ) ou de la prudence.
Mauvais point s’il a pris peur.

============

Vendredi 23 mai.

Finalement la machine s’accélère.

Il y a eu les exécutions « silencieuses » dans un 1er temps (départs ciblés).

Là, à cette heure, les projets (au moins les plus gros) prennent des objectifs de « x personnes en moins ». Pour exécution immédiate.

Les OTP (lignes comptables internes) sont scrutées. Plus de budget => intercontrat direct (la situation des Talents que tu citais).

Big changement par rapport aux prédécesseurs !

La suite du plan est (obligatoirement) une pression forte (euphémisme) sur le commerce / les personnes en intercontrats / les resource managers pour réduire les invendus de x par semaine (« si vous tenez à votre poste… »).

Pas d’état d’âme si décalage caricatural entre profil & attendu du poste (« vous êtes data scientist ? Vous savez bien dépanner les imprimantes ! » – ce n’est pas un cas réel mais çà s’approche de ce qui est en train d’arriver).

La suite va dépendre de la capacité à replacer les personnes libérées (qui s’ajoutent au stock d’intercontrats que tu as publié). Replacés, tout va bien pour ta marge.

Pas capable de les replacer ?

Là, on attaque le dur. Seule solution économique, la jouer façon Breton chez Orange : faire partir d’eux-mêmes les invendus en leur mettant la pression. Mais je ne te fais pas de faire de dessins sur les risques de cette « méthode Breton ». Pour l’instant, Atos a été épargné par les suicides, un cas récent en Roumanie il y a quelques mois, mais ça n’a pas intéressé les médias français.

On cumule un sacré nombre de handicaps :

• pourquoi acheter du Atos ? il y a plein d’alternatives équivalentes pérennes. Et souvent moins chères (on n’est pas une low cost mais on part sur leurs marchés…)
• le commerce a été mutilé par les économies précédentes. Adieu les joueurs de L1, ils sont partis. Là c’est du National 3 quand tu as de la chance, Régional autrement
• une montée des égoïsmes dans les équipes, survivre personnellement va passer avant la réussite collective (déjà vécu ailleurs). Ça plombe sacrément l’efficacité.

Capacité de la nouvelle équipe à faire avancer une boite déstabilisée sur un métier qui est une langue étrangère pour eux … ?

Je vois se dessiner une série de cycles rapides (trimestriels) : « économies par élagage » => amélioration temporaire des comptes => descente d’une marche faute de punch => redégradation des comptes => économies…

Des genres de Girondins de Bordeaux, toi qui aime le ⚽

Dans ce genre de spirale infernale le risque est terrible sur la démotivation des équipes dans ce genre de situation. C’est mortel sur les activités critiques (gains d’affaires, projets à risques & pénalités).

============