D’après des sources proches de sources proches du dossier (humour Challengeais), une des raisons pour lesquelles Airbus a accéléré sa communication cette semaine en passant de “on ne commente pas les rumeurs”, à “on est en discussions avec Atos”, c’est qu’il y avait déjà une lettre d’intention non engageante envoyé par Airbus et un audit du cabinet Alvarez & Marsal spécialisé dans les audits de “due dilligence” en cours de réalisation. En effet tout le monde se doute qu’un audit sur une société comme Atos ne se fait pas en 3/4 jours et que l’audit était donc déjà en cours de réalisation au moment de l’article des Echos du 1er janvier.
Aussi pendant qu’Airbus disait ne pas commenter les rumeurs, Meunier qui avait rejeté en 5mn l’offre de Layani avait déjà donné accès au cabinet d’Alvarez & Marsal (spécialiste du “due dilligence”) aux livres comptable d’Atos, après avoir accepté d’entrer en discussions exclusives avec Airbus, bien avant l’article Des Echos du dimanche 1er janvier. Quand on réfléchit aux commentaires de l’article des Echos par Airbus et par Atos, quelle hypocrisie… On pourrait même imaginer que les négociations avaient déjà commencé au moment de l’offre de Layani.
Ce type d’audit “due diligence” est non seulement très classique mais quasi systématique lors d’un rachat ou une prise de participation amicale. C’est le gros intérêt d’une OPA amicale où la proie vous ouvre ses livres de compte, à comparer d’une OPA hostile ou la proie vous cache toute information.
Donc dans le cadre d’une lettre d’intention non engageante et avant de passer à une lettre d’intention engageante (pré-contrat) et de mettre 1.2Md€ sur la table, il est normal que Airbus demande un audit préalable des comptes, à savoir que vis à vis de son propre conseil d’administration, de nos amis allemands pointilleux, il faut que les comptes Atos soient audités par une personne tierce à Atos, à savoir un cabinet d’audit spécialisé en missions de “due dilligence”.
Qu’est-ce que le “due diligence” ?
Avant une opération de fusions-acquisitions, il est important de réaliser un audit appelé due diligence. L’essentiel à retenir à ce sujet.
Également appelé diligence raisonnable, le due diligence est tout simplement un audit d’acquisition réalisé par l’acheteur potentiel afin de mieux connaître les faiblesses et les forces de la cible avant de procéder à la transaction. Cette procédure de vérifications intervient lors des opérations suivantes :
- Fusions-Acquisitions ;
- Cession d’entreprises ;
- Achat de titres de participation (actions ou parts sociales).
Le principal objectif du due diligence est de limiter les risques d’acquisitions comme :
- Un prix de cession surévalué ;
- Des bilans incohérents entraînant des pertes financières ;
- L’existence de fraudes fiscales ;
- Le blanchiment d’argent ;
- Un redressement de cotisations sociales.
À noter que l’audit d’acquisition s’effectue :
- Après le protocole d’accord ou la lettre d’intention ;
- Avant la finalisation du contrat de cession.
Pourquoi réaliser un due diligence ?
Le due diligence permet à l’acquéreur de s’assurer que les informations données par la société cible lors des négociations sont exactes. Zoom sur les principaux avantages de cet audit.
La possibilité de négocier le prix
Une fois en possession des informations clés sur les faiblesses et les forces de l’entreprise cible, l’acquéreur est en mesure de déterminer sa valeur réelle. En cas de surévaluation du prix de cession, il peut négocier une réduction et éviter un investissement exorbitant.
L’ajout ou la réévaluation des garanties contractuelles
Si l’audit d’acquisition révèle des actifs risqués, l’acheteur peut demander l’insertion de certaines clauses comme :
- La garantie d’actif qui oblige le vendeur à indemniser l’acquéreur en cas de diminution des actifs dont la cause est antérieure à l’opération de cession.
- La garantie de passif. Celle-ci protège l’acquéreur contre une augmentation du passif après la cession, mais causé par un évènement antérieur à sa signature.
D’autres alternatives sont également envisageables. L’acheteur peut par exemple :
- Négocier une garantie plus étendue.
- Se rétracter et annuler la cession.
Le due diligence est-il obligatoire en France ?
La réponse est non. Le due diligence est facultatif, mais recommandé. Il est mené selon la volonté de l’acquéreur. En d’autres termes, le due diligence est personnalisé. Il consiste généralement en un audit financier, sachant que les acquéreurs s’intéressent plus rarement à l’audit stratégique. Par ailleurs, un due diligence complet s’avère plus coûteux.
C’est quoi audit financier ?
L’audit financier consiste en l’analyse des documents comptables de l’entreprise et de sa situation financière passée, présente et future. Il concerne :
- Les bilans ;
- Le compte de résultat ;
- Les flux de trésorerie ;
- Le plan de financement.
Voici quelques exemples d’éléments vérifiés lors d’un audit financier :
- Les capitaux propres ;
- Le résultat d’exploitation ;
- Les dettes bancaires ;
- Le seuil de rentabilité ;
- Les charges courantes…
C’est quoi audit stratégique ?
Les vérifications dans le cadre du due diligence stratégique s’attachent principalement au potentiel de développement de l’entreprise cible. Elles portent sur :
- Le positionnement de la société sur le marché ;
- Les compétences des dirigeants ;
- La compatibilité ou non des cultures des 2 sociétés ;
- L’analyse du marché (demandes, tendances) ;
- L’analyse de la concurrence.
Due diligence : quels autres types d’audits effectuer ?
Outre l’audit financier et le due diligence stratégique, l’acquéreur peut faire appel à un cabinet d’audit pour effectuer des vérifications sur les domaines suivants :
L’audit juridique et social
Les vérifications portent sur :
- Les pactes d’actionnaires ;
- Les bâtiments et terrains détenus par l’entreprise ;
- Les contrats de travail ;
- Les marques et brevets déposés ;
- Les licences d’exploitation de logiciels, dessins et modèles.
L’audit fiscal
L’objectif est d’éviter les contentieux fiscaux en cas de contrôles de l’administration. Outre la situation fiscale de l’entreprise cible, le repreneur doit connaître l’étendue de ses obligations, c’est-à-dire :
- Le régime d’imposition ;
- Les taux applicables.
Vous comprendez après cette lecture que avant de mettre 1.2Md€ sur la table, ce qui n’est pas une petite somme et quasiement la valorisation du groupe Atos en entier, Airbus mandate un donc cabinet de due dilligence avant de lacher le cash et A&M font partie des meilleurs.
D’autant que l’opération est très complexe. Airbus va acheter une société Evidian SA, qui existe depuis 1999, mais ne réalise que 14M€ de CA et que la filialisation des activités qui vont donner la valeur de 4Md€ à Evidian, n’ont même pas encore démarré. Il s’agit donc d’acheter une société avec un contrat ad hoc qui précise à l’avance ce qu’il aura dans la société, à savoir le périmètre en cours de filialisation, “en cours” est un euphémisme vu qu’il va d’abord y avoir ce vendredi 20, le jugement de référé de la CGT pour bloquer la scission.
Donc tout audit qui serait légitime dans un achat basique, l’est encore plus dans l’achat d’un périmètre en cours de filialisation.
Quand aux réserves sur le business plan, je pense que même les plus bullish des PP n’ont jamais cru une seule seconde au power point de McKinsey du 14 juin 2022, où Evidian en 3 ans et demi dépasserait les marges de Capgemini tout en faisant une croissance de 7% par an. Je pense que Airbus n’avait pas besoin d’un cabinet pour emettre de telles réserves. Je pense que tout le monde signerait de suite pour une marge à 10% en 2026 avec 5% de croissance annuelle.
Il s’agit d’un audit de contrôle préalable à la prise de participation d’Airbus au capital d’Evidian.
Donc, le cabinet d’audit Alvarez & Marsal spécialisé en Due Dilligence va être évidemment plus vigilant et plus pointilleux que les commissaires aux comptes, qui ont évidement une due diligence aussi mais qui subissent aussi la pression de Meunier pour certifier les comptes (l’entreprise est un client du CAC, il ne faut pas l’oublier).
Le cabinet A&M a le droit et le devoir d’émettre des réserves sur certains points. Le journaliste de Challenges tournant probablement à la Vodka, voir cet exemple ci-dessous mis en ligne dimanche 15/01 avec un titre qui ne veut rien dire, il ignorait l’expression de la langue française et très nuancée qui est: émettre des réserves dans un audit et a utilisé négligemment l’expression « refus de signer l’audit », EXPRESSION QUI N’EXISTE PAS dans le langage français, et qui existe seulement aux USA où le terme audit veut dire rapport de commissaires aux comptes. Notre journaliste est peut-être un américain amateur de Vodka russe.
Article Challenges avec faute de français “Les géants de la grande distribution condamnent contre un texte”. Da da vodka…
FAUT-IL S’INQUIETER DE CET AUDIT ET QUE A&M AIT EMIS DES RESERVES ?
Nous l’avons vu plus haut, cet audit est quasi-systématique.
Quand au fait qu’il y ait des réserves il y a en page d’accueil du blog un article sur le Goodwill qui explique que tout le monde sait et à forciori avec l’article d’ODDO AM que le Goodwill d’Atos est surrévalué. Le marché le sait et c’est pricé dans le cours. Airbus le savait et donc ceci n’aura pas d’impact sur les négocations avec Airbus. On peut plutôt penser qu’il s’agit de manoeuvre visant à déstabiliser ces négociations.
Au pire, cela pourra donner un petit peu de carburant à Airbus pour discuter le prix.