Atos : David Layani, la revanche d’un homme pressé [LES ECHOS]

Nouvel article très intéressant d’Isabelle Couet qui intervient apparemment occasionnellement sur le dossier Atos, c’est elle qui avait écrit l’article « peut-on encore croire les entreprises? ». Elle s’attarde sur des zones d’ombres que le blog a déjà soulevé.

  -COPYRIGHTS LES ECHOS-

Le patron de Onepoint l’a emporté dans le dossier Atos face au milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, alors que peu de personnes misaient sur lui il y a encore quelques mois. Un coup extraordinaire pour ce self-made-man qui aime les paris fous. Portrait.

Par Isabelle Couet

Publié le 11 juin 2024 à 20:05 | Mis à jour le 11 juin 2024 à 20:13.  
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David Layani en rêve depuis des années. Ce lundi 10 juin marque un peu sa revanche. Alors que la France est encore sous le choc de l’annonce d’une dissolution, un autre coup de théâtre se prépare du côté de Bezons, dans la banlieue parisienne. Tard dans la soirée, la bataille homérique pour la reprise d’Atos doit se dénouer. Après plusieurs reports, le conseil d’administration du groupe informatique en péril doit enfin décider qui l’emportera entre le milliardaire Daniel Kretinsky et le Petit Poucet David Layani, fondateur de la société de services numériques Onepoint.

La fumée blanche est sortie. Le second l’a emporté, infligeant un rare camouflet au magnat tchèque qui a fait fortune dans l’énergie. Le golden-boy du 16e arrondissement, que le monde des affaires observe avec curiosité depuis des mois, se remémore sans doute ce moment où Bertrand Meunier, du temps où il présidait encore aux destinées d’Atos, n’avait même pas daigné le recevoir.

Alliance avec des fonds spéculatifs

La victoire de David Layani, c’est celle d’un homme qui n’est pas du sérail, qui ne sort pas des grandes écoles, comme il le rappelle souvent. Alors qu’il a perdu autour de 75 millions d’euros avec la chute du cours d’Atos, dont il est le premier actionnaire, son audace, ses coups tactiques, parmi lesquels son alliance avec des fonds spéculatifs – cette espèce dont la place de Paris se méfie comme du diable -, ont payé.

Quel est donc le moteur de ce self-made-man de 45 ans, que beaucoup ont comparé à la grenouille qui veut se faire plus grosse que le boeuf ? « Je ne pense pas qu’il recherche la richesse – il l’a déjà -, c’est plutôt la puissance », hasarde l’un de ses anciens collaborateurs. Le dirigeant, cheveux blonds plaqués en arrière, classé 161e fortune française, avec un patrimoine estimé à 800 millions d’euros par « Challenges », a sans doute un certain besoin de reconnaissance. Il prépare depuis longtemps son entrée dans la cour des grands.

Son mot fétiche ? « Accélérer ». C’est peu dire qu’il passera à la vitesse supérieure en croquant le vieux fleuron de l’informatique, s’il va au bout du processus. Sa société Onepoint bondira d’un seul coup de 3.500 salariés à près de 100.000. Et son chiffre d’affaires, de 500 millions d’euros, selon ses dires, à plucops de 10 milliards ! Un formidable raccourci pour cet homme pressé.

Le rêve américain de Thierry Breton

A l’automne dernier, quand la bataille entrait dans le dur, David Layani le reconnaissait sans détour, cette prise ferait « gagner dix ans de développement » à son entreprise. L’opération devait notamment lui ouvrir les portes du marché américain. Un rêve que Thierry Breton, l’ancien patron d’Atos devenu commissaire européen, avait lui-même concrétisé en rachetant au prix fort la société Syntel. « Mettre la main sur le business américain, c’est tout l’intérêt du projet. Ça nous apporterait beaucoup », lâchait, comme une évidence, le quadra beau parleur.

Sa victoire est d’autant plus stupéfiante aux yeux de l’establishment que David Layani avait contre lui la toute-puissante banque BNP Paribas, qui s’était rangée dans le camp de Daniel Kretinsky. En outre, il n’a jamais levé certaines zones d’ombre.

A commencer par les comptes sociaux de Onepoint, qui ne sont pas déposés. En 2022, dans le magazine « EcoRéseau Business », le patron qui aime la lumière mais goûte moins la transparence annonce seulement qu’il vise un doublement du chiffre d’affaires, à 1 milliard d’euros en 2024, et 2 milliards en 2026.

Alors qu’il n’a jusqu’alors jamais évoqué la rentabilité de sa société, il réagit quand on lui rapporte les bruits qui circulent chez ses concurrents. « Les entreprises de services numériques dégagent en moyenne une marge opérationnelle de 7-8 %, les meilleurs atteignent 10 %, Onepoint serait autour de 5 % », dit ainsi un intervenant.

« Avec le conseil, notre marge opérationnelle s’élève à 10 %, c’est peut-être inférieur aux cabinets les plus performants, mais nous investissons beaucoup », lâche David Layani, un brin agacé. Il assure d’ailleurs avoir fourni toutes les informations financières à la conciliatrice du dossier Atos, ainsi qu’aux créanciers.

« Lui et ses lieutenants ne cachaient pas que la société n’était parfois pas passée loin du précipice. David Layani est quelqu’un qui prend d’énormes risques », glisse un ancien collaborateur. Là encore, l’intéressé balaie. Pour appuyer le propos, il révèle que la dette de son entreprise représente 1,7 fois l’Ebitda. Et puis, n’a-t-il pas persuadé un fonds d’investissement aussi dur en affaires que Carlyle de lui prêter de l’argent ?

Financement de Carlyle

Le 9 novembre dernier, Onepoint dévoile, avec tambour et trompette, « un financement obligataire d’un montant pouvant aller jusqu’à 500 millions d’euros auprès de Carlyle Global Credit, la branche crédit du gestionnaire d’actifs alternatifs ».

Au conseil d’administration d’Atos, on prend note. Le chiffre magique de 500 millions apportés par Carlyle est repris par tous les médias. Seul le monde de la finance, où l’on connaît les chausse-trappes de ces montages, est réservé. « Rien ne dit que les 500 millions sont facilement accessibles ; il y a peut-être des critères difficiles à remplir pour obtenir chaque nouvelle tranche… Imaginez s’il faut que Onepoint triple son résultat opérationnel ! » souffle un gérant obligataire.

Rien ne dit que les 500 millions sont facilement accessibles ; il y a peut-être des critères difficiles à remplir pour obtenir chaque nouvelle tranche… Imaginez s’il faut que Onepoint triple son résultat opérationnel !

Un gérant d’actifs

Impossible de connaître les conditions exactes de ce financement. Dans un rapport de gestion datant de mars 2024 que « Les Echos » ont consulté, on voit néanmoins qu’une ligne de 23 millions d’euros non sécurisée, à échéance 2031, a été accordée par Carlyle à un taux de 12,93 %.

« C’est un niveau très élevé, donc très risqué ; normalement, dans cette catégorie d’investissement, on voit des taux monter jusqu’à 8-10 %, mais pas plus », décrypte le même gérant. Un opérateur de salle de marché abonde : « C’est monstrueux, c’est presque du ‘distressed’ [prêt en quasi-défaut de paiement, NDLR] ! »

Paradis latin

Autre élément qui laisse un peu songeur, les deux noms accompagnant David Layani dans le consortium pour la reprise d’Atos : Walter Butler , le propriétaire du cabaret le Paradis latin, énarque de 67 ans, qui a autrefois redressé des entreprises, et Jean-Louis Bouchard, patron d’Econocom, une société peu connue de distribution et de services informatiques. Cet attelage donne l’impression que les candidats ne se sont pas bousculés pour investir aux côtés du patron de Onepoint.

Onepoint est-il un mirage ou une success-story ? La société, qui a fêté deux décennies d’existence en 2022, jouit d’une assez bonne réputation. Elle se présente comme « un leader européen du digital, architecte des grandes transformations des entreprises et des acteurs publics ». Dit plus prosaïquement, Onepoint est une ESN (ce qu’on appelait autrefois une SSII), qui propose de la gestion de parcs informatiques.

Seconde division

Un noyau dur auquel David Layani a ajouté un service de conseil, à plus forte valeur ajoutée. Le flamboyant patron, qui vient de débaucher trois pointures de KPMG en ce début 2024 et, formule les choses de cette façon : « Il existe trois ou quatre entreprises qui font comme nous : Capgemini, Accenture, le BCG et Publicis ». Une affirmation qui en fait tousser certains dans son secteur. « Ses clients, comme les Aéroports de la Côt d’Azur, la ville de Noisy-le-Grand, la Fédération nationale des travaux publics, sont plutôt Tier 2 que Tier 1 », souligne l’un d’eux, ce qui, traduit du jargon bancaire, veut dire « plutôt seconde division que première ». « Son ADN, c’est les collectivités locales et les entreprises de taille intermédiaire. »

Après deux ans de travail, on a eu neuf secondes pour savourer la victoire et il faut déjà se concentrer sur l’après.

David layani

Un ancien de Onepoint nuance. « Il est inventif et crée, par exemple, des joint-ventures, sur des projets bien spécifiques, avec des banques. » Ces investissements lui permettent d’accéder à la clientèle qui consomme le plus de prestations informatiques en France.

Le talent de David Layani à bien s’entourer ne fait aucun doute. L’entrepreneur s’est constitué une garde rapprochée de choc. Parmi ces associés, Matthieu Fouquet, le vrai « boss opérationnel », brille dans la gestion au quotidien. Jean-Fabrice Copé, frère cadet de Jean-François et Monsieur « fusions-acquisitions », apporte toute sa crédibilité à Onepoint vis-à-vis des milieux d’affaires, grâce à son CV en or (Insead Singapour, HEC, KKR…) et à ses connexions.

« J’ai beaucoup de banquiers et d’avocats », plaisante l’ancien joueur de poker de haut niveau, qui a troqué la veste de survêtement et les lunettes de soleil pour un costume rayé anthracite.

La Californie au Troca

L’image de Onepoint et de David Layani tient aussi aux lieux. Quand on pousse la porte du QG parisien, avenue d’Eylau, dans le 16e arrondissement, c’est un peu la Californie au Troca. Derrière la façade classée alignée dans la perspective de la tour Eiffel, se dresse un bâtiment de verre, où un joyeux méli-mélo de meubles et d’objets design piochés dans des magazines de décoration tape immédiatement dans l’oeil du visiteur. Dans cette fourmilière, où vont et viennent de jeunes cadres cool comme leur patron, on croise un coach moulé dans un tee-shirt Lycra, une corde à sauter à la main. Il attend des volontaires dans la cour verdoyante que surplombe la salle à manger de David Layani, où trône une armure de samouraï.

Onepoint semble même parfois davantage relever du projet immobilier et événementiel que de la SSII. « Layani loue les locaux aux clients », rapporte un ancien de la société. « C’est une manière de financer ses bureaux. » Il se souvient : « Le problème c’est qu’il arrivait souvent que les collaborateurs se retrouvent dans un couloir sur un tabouret ou près des toilettes, faute de place. »

David Layani a de qui tenir. Sa mère, Evelyne, est à la tête d’une société qui organise de somptueux mariages, bar-mitsva ou autres célébrations. Mêler l’utile à l’agréable fait partie de la culture de cet homme d’affaires peu conventionnel.

Toujours spectaculaires, ces « lieux de vie » – comme on dit chez Onepoint – attirent du beau monde, à Paris, Nantes, Lyon et dans quelques autres métropoles régionales. Du ministre de l’Economie Bruno Le Maire, au président des Hauts-de-France Xavier Bertrand, le monde politique n’y résiste pas.

Vente de yearlings à Deauville

La proximité de David Layani avec le pouvoir fait d’ailleurs partie de sa légende. Cela lui a aussi joué des tours : il est mis en examen dans l’affaire de rétractation d’un témoin en faveur de Nicolas Sarkozy. Celui qui a grandi avec la bulle Internet a accompagné Emmanuel Macron en Israël et a reçu l’ordre national du Mérite des mains de Nicolas Sarkozy, en présence de son ami Gérald Darmanin.

Entretenir son réseau est une seconde nature. Aucun cercle ne doit lui rester fermé. C’est ainsi qu’en 2023, le petit prince de l’informatique, amateur de polo, a rejoint la caste des propriétaires de chevaux de course. Le 18 août dernier, on le croisait à Deauville lors de la vente de yearlings, cet événement annuel qui rassemble le gratin mondial, comme l’Aga Khan ou l’émir de Dubaï. Le patron de Onepoint a créé la société « Ecurie Layani & Famille » et a choisi un entraîneur star pour l’aider dans ses emplettes. Il possède aujourd’hui 11 jeunes pur-sang.

Où s’arrêtera David Layani ? S’il absorbe Atos et en devient le directeur général, l’homme à l’ambition sans limites devra relever le plus grand défi de sa carrière : remettre en marche un géant à terre. « Après deux ans de combat, on a eu neuf secondes pour savourer la victoire et il faut déjà se concentrer sur l’après », confie le dirigeant. Il sait qu’il est attendu au tournant.

https://www.lesechos.fr/industrie-services/services-conseils/atos-david-layani-la-revanche-dun-homme-presse-2100780

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Si vous avez subi d’énormes pertes sur Atos, sachez qu’une action en réparation est en cours de constitution sur le site Upra.fr (l’Union Pour la Réparation des Actionnaires), pour recouvrer une partie de vos pertes par voie de justice. Cette action sera totalement gratuite pour les plaignants car nous la ferons financer auprès de fonds spécialisés qui prendront un pourcentage en rémunération et l’UPRA ne vous demandera aucun paiement ni cotisation ou autres. À ce jour, plusieurs fonds ont fait part de marques d’intérêts, mais nous n’avons pas encore de réponse définitive. La réponse dépendra du nombre de personnes pré-inscrits et des comptes audités 2023.

Afin de ne pas déstabiliser la société, cette action ne visera ni Atos, ni ses dirigeants ou ex-dirigeants, mais uniquement ses auditeurs (commissaires aux comptes) en particulier DELOITTE supposé être le n°1 mondial de l’audit, mais que l’UPRA soupçonne avoir été très complaisante vis-à-vis d’Atos avec les règles comptables en vigueur, et leur reproche d’avoir fait manquer une chance aux actionnaires de ne pas acheter l’action quand elle était surcotée vis-à-vis de sa réelle valeur et d’avoir fait manquer une chance d’avoir vendu, quand la société s’effondrait et que la comptabilité ne reflétait pas cet effondrement, en particulier une absence totale de dépréciation d’actifs en 2022.

Je rappelle qu’à la publication d’un jugement qui dirait le contraire, Deloitte est supposé avoir certifié les comptes d’Atos de manière totalement sincère, et l’avis exprimé ci-dessous est l’avis de l’UPRA uniquement et reste à l’état de soupçons tant que nos preuves n’auront été validées par un juge.

Pour des raisons de coûts de procédure, elle est réservée aux personnes ayant subi des pertes supérieures à 10 000€, sinon les coûts judiciaires, avocats, expertises, etc… en millions d’euros seraient supérieurs à la perte et ne seraient pas rentables pour le fonds qui financera ce recours. Soyez assuré qu’il ne s’agit pas de snobisme, mais réellement de contraintes financières.

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