COPYRIGHTS LE MONDE –
La Commission européenne prend ses distances après la mise en garde de Thierry Breton à Elon Musk
Bruxelles désapprouve le moment choisi par le commissaire français pour hausser le ton face au patron de X avant son entretien avec Donald Trump.
Lundi, le Français a alerté le patron de X sur son devoir de respecter les règles européennes en matière de modération des contenus, dressées dans le règlement sur les services numériques (connu sous le sigle anglais DSA, pour Digital Services Act). Avec l’entrée en vigueur de cette législation, en octobre 2022, l’Union européenne (UE) est devenue pionnière en matière d’encadrement des réseaux sociaux et des risques systémiques qu’ils posent pour la société, leur imposant notamment de prévenir « l’amplification de contenus dangereux », comme l’a souligné le Français dans sa lettre, qui souligne également la flambée de violences au Royaume-Uni. Cette obligation vaut pour toute publication accessible aux citoyens européens, y compris pour « les diffusions en live ». Elle s’impose aussi à « vous, en tant qu’utilisateur avec 190 millions de followers », a rappelé le commissaire à Elon Musk, qui partage, à l’occasion, de fausses informations, y compris sur l’élection américaine.
Défenseur autoproclamé de la liberté (totale) d’expression, le milliardaire est engagé dans un conflit avec l’UE, qu’il accuse de vouloir le forcer à « censurer la parole ». En décembre 2023, la Commission avait lancé une enquête officielle au sujet de X, portant sur la dissémination de contenus illégaux et l’efficacité des mesures prises (ou pas) par l’entreprise pour lutter contre la manipulation de l’information. Les conclusions sont attendues dans les prochaines semaines.
En vertu du DSA, la Commission peut infliger des amendes pouvant atteindre 6 % du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise concernée. En l’occurrence, elle pourrait même décider de baser son calcul sur les revenus de l’ensemble des firmes détenues par Elon Musk, au vu de son influence décisive sur le fonctionnement de X. De plus, en cas de violations graves et répétées, la plate-forme mise en cause peut être interdite d’opérer dans l’UE.
Malaise
Thierry Breton n’a pas hésité à indiquer que la Commission se penche, pour son enquête, sur tout contenu pouvant « inciter à la violence, à la haine ou au racisme », dans le cadre de « débats et d’interviews électoraux ». Une référence évidente à la conversation prévue entre Elon Musk et Donald Trump, qui a été diffusée par la suite pendant deux heures sur X, et fut ponctuée de fausses informations.
Mardi, la Commission a à son tour insisté sur l’obligation de X de se plier à la législation européenne. Elle a cependant refusé de commenter cet événement en particulier. « Le DSA fournit un cadre général dans lequel les très grandes plates-formes doivent opérer, et cela va bien au-delà des cas spécifiques », a précisé Arianna Podesta. Et d’ajouter que la « lettre [de Thierry Breton] ne voulait en aucun cas interférer avec les élections américaines. L’UE n’interfère pas dans des élections ».
Ce n’est pas la première fois que le Français, avec son style franc-tireur, irrite Ursula von der Leyen. Et cet épisode risque de ne pas être le dernier, alors que l’Allemande a obtenu un nouveau mandat à la tête de la Commission et que Thierry Breton a été reconduit par le président français, Emmanuel Macron, comme commissaire.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/08/13/la-commission-europeenne-prend-ses-distances-avec-thierry-breton-apres-sa-mise-en-garde-a-elon-musk_6280037_3234.html
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