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Epaulés par des cabinets d’avocats, de conseils et des agences de communication, David Layani, Daniel Kretinsky et les banques créancières se déchirent sur le périmètre stratégique du groupe en critiquant les projets et les moyens financiers respectifs des concurrents. Le président du groupe a appelé les différentes parties à un retour au calme.
Par Régis Soubrouillard le , mis à jour le 23.05.2024 à 16h00
Les grandes manœuvres pour le rachat d’Atos ont bel et bien commencé. Et le duel entre Daniel Kretinsky et David Layani pour la reprise du groupe bat son plein. Alors que les discussions sur la reprise du groupe s’intensifient, les banques créancières ont exprimé leur avis dans un courrier adressé au comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) et à l’administratrice judiciaire Hélène Bourbouloux, comme révélé par La Tribune. Elles menaçaient de rejeter l’offre de Daniel Kretinsky. Les tensions sont aussi vives au sein du pool bancaire. Selon La Lettre, BNP Paribas, principal partenaire de Daniel Kretinsky dans ses affaires, a fait savoir qu’elle quittait le comité de pilotage qui regroupe les établissements financiers. D’autres banques françaises pourraient rejoindre le camp du miliardaire tchèque.
De son côté, David Layani, candidat à la reprise globale d’Atos avec Walter Butler pour en faire un « OneAtos », attaque l’homme d’affaires tchèque sur la stratégie qu’il souhaite mettre en œuvre. Celle-ci prévoit une scission du groupe et un rachat « limité » aux activités d’infogérance d’Atos. En toile de fond de la controverse : le périmètre des activités dites stratégiques du groupe.
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TechFoundations, une entité « non stratégique » jugée stratégique par le camp Layani
Pour appuyer la défiance, l’un des cabinets de conseil de Layani a répertorié les activités « stratégiques » d’Atos en fonction de la partie du groupe concernée (TechFoundations et/ou Eviden). Difficile de reporter tout le listing qui détaille plus d’une centaine des activités stratégiques ou souveraines du groupe mais il apparaît, selon nos informations, que plusieurs secteurs sont concernés : la santé, les collectivités territoriales, les administrations centrales et le parapublic, la défense et la sécurité.
Ces activités concernent souvent Tech Foundations – considérée comme la partie non stratégique d’Atos et que convoite Daniel Kretinsky, parfois Eviden. Ces activités se fondent aussi parfois dans les deux entités. Ainsi dans le secteur de la santé, Tech Foundations « accompagne le déploiement du dossier patient informatisé dans les 38 hôpitaux de l’APHP ». Un secteur devenu hautement stratégique dans la mesure où les hôpitaux sont devenus les cibles de fréquentes cyberattaques.
Dans le secteur des collectivités territoriales, Tech Foundations (TF) travaille sur les systèmes d’information de plusieurs villes, notamment celle de Marseille. Concernant les administrations centrales, TF permet « au contribuable de déclarer ses revenus en ligne » sur le site impots.gouv.fr.
Dans le parapublic, TF officie également dans le secteur stratégique du nucléaire par « l’exploitation des applications critiques d’EDF, d’ORANO et de Framatome ».
Mais c’est dans la défense et la sécurité que les activités et la complémentarité des deux entités sont les plus flagrantes. Ainsi, selon la note, TF permet « l’approvisionnement en pièces détachées de la flotte de la marine nationale ».
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Une véritable porosité entre les différentes entités
TechFoundations et Eviden travaillent ensemble sur toute la chaîne de valeur de l’entreprise Navalgroup. Et pour le Ministère des armées, TF assure « la mise en réseau de l’ensemble des ressources informatiques, afin de faire communiquer les systèmes d’acquisition et les systèmes d’armes ».
Évidemment, cette note qui détaille les activités stratégiques d’Atos n’est pas dénuée d’arrière pensées puisqu’elle cherche à montrer que les aspects stratégiques et souverains concernent tout le groupe Atos, qu’une scission comporterait des risques non négligeables et qu’il convient donc de privilégier le projet de David Layani qui permettrait de conserver le groupe sous pavillon français, tout en le maintenant dans son intégrité actuelle.
Un constat, partagé, en partie, par les sénateurs de la mission d’information qui ont récemment rendu leur rapport sur Atos. Ils estimaient que « les activités stratégiques sensibles de nature souveraine ne se limitent pas à l’une de ces deux parties, mais sont présentes dans l’ensemble des activités du groupe ». Ils exprimaient par ailleurs « leurs doutes quant à̀ une éventuelle porosité́ entre les contrats rattachés à l’entité Tech Foundations et ceux rattachés à l’entité Eviden, et en particulier à sa branche BDS réunissant des activités souveraines de premier plan ».
Atos pas loin de tomber de la falaise selon le camp Kretinsky
Du côté de Daniel Kretinsky, les représentants de la holding – plutôt discrets jusque-là – étaient présents à Paris cette semaine dans les locaux du cabinet d’avocats Weil qui conseille le milliardaire. « Nous nous intéressons à l’industrie des réseaux, au sens large et pour nous, Atos s’inscrit dans cette logique » a expliqué Jiri Novacek qui fait partie du board de EPEI, la holding de Daniel Kretinsky.
Pour ce qui concerne la scission du groupe, le camp Kretinsky estime que les activités conjointes des différentes entités ne sont pas très importantes et c’est même la scission en deux segments différents qui permettra, selon eux, le « sauvetage » d’Atos. « Tout le monde présente un diagnostic très différent sur la santé d’Atos. Nous sommes les seuls à avoir la liberté de ton sur la situation réelle de l’entreprise, qui est en train de tomber de la falaise » a prévenu le représentant de Daniel Kretinsky qui estime que l’état du groupe nécessite une « restructuration profonde » mais qui concernerait essentiellement l’Allemagne.
On insiste également sur les modalités de financement de l’acquisition du groupe : « Pour Daniel, le point clé c’est qu’il joue son argent, ce n’est pas un pari qu’il fait avec l’argent des autres, c’est un élément de comparaison instructif avec les offres des autres qui ne sont pas du tout dans la même situation au risque de répéter les erreurs passées » assure le camp Kretinsky qui juge que le plan OneAtos proposé par David Layani devrait mobiliser au moins 400 millions d’euros d’investissement. Sans compter la renégociation de la dette de 5,2 milliards d’euros d’ici fin 2025.
Mustier appelle au calme
« Si cette restructuration n’est pas conduite en tenant compte de la réalité de la situation financière de la société, la vitesse du déclin pourrait être énorme et il n’y aura plus rien dans un an. Ce n’est pas seulement un épouvantail », commente auprès de Challenges le représentant de la holding de Daniel Kretinsky. Ce dernier n’exclut pas de modifier son offre avant de présenter son projet officiel la semaine prochaine d’ici la date butoir du dépôt des offres le 31 mai.
Mais la surenchère à l’œuvre entre les différents postulants ne plaît pas à tout le monde. Dans l’entourage du ministre de l’Economie, on préférerait que « tout le monde garde son calme » même si on reconnaît aussi que c’est une compétition qui est en cours. C’est surtout du côté de la direction d’Atos qu’on apprécie très peu l’ambiance : « Le conseil d’Atos ne peut pas accepter les récentes déclarations publiques inacceptables qui portent atteinte à la réputation du groupe et souhaite que ces commentaires cessent immédiatement pour permettre à nos salariés de continuer de travailler sereinement pour soutenir nos clients avec toute l’énergie et le dévouement qu’ils montrent tous les jours » a prévenu Jean-Pierre Mustier, le président du conseil d’administration dans un communiqué. Pas sûr néanmoins que cet appel à la trêve sera respecté.
https://www.challenges.fr/entreprise/reprise-d-atos-negociations-a-couteaux-tires-entre-layani-kretinsky-et-les-banques_893886
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